J’ai un avis très partagé sur ce film.
D’un côté il m’énerve et parfois j’ai même envie d’appuyer sur stop et de changer de film que j'ai personnellement trouvé très - trop - présomptueux, à faire des références cinématographiques comme si on était rédacteur des Cahiers, à insérer des plans de nus et des scènes de sexes comme si le seul but de ces plans étaient des briser des règles de pudeur plutôt que d’apporter de véritables images bien placées valant la peine d’être regardées avec attention, à ressortir les propos tenus dans les années 70 sous forme de clichés.
Louis Garrel arbore toujours ses airs de parisien-gauchiste-pseudo-intellectuel-qui-parle-plus-qu’il-ne-fait et cet air d’être supérieur qu’il porte en permanence tant sur son visage que dans son attitude - mais ça encore c’est comme ça qu’on le connait, ce n’est pas nouveau dans ce film et au final, à porter toujours ce même costume, on finit par se prendre au jeu et à y voir plus une marque de fabrique. Bref, pour moi, son personnage passe encore. Mais ce n’est pas sans compter sur Isabelle, personnage absolument insupportable, beaucoup trop théâtrale pour sonner juste (ce qui peut également plaire, je le conçois), aux caprices de gamines mais se croyant tout de même bien plus maline que la moyenne. Reste ensuite au spectateur d’adorer ou détester le personnage, bien sûr.


MAIS d’un autre côté intervient l’oeil étranger, l’américain Matthew débarque avec son innocence, sa sincérité et sa vision américaine de la France, certes naïve mais pertinente.
D’abord un peu agaçant dans sa naiveté de jeune étranger, on est rapidement très agréablement surpris lorsqu’on le voit démonter au fur et à mesure les clichés qu'avait posé le film, retourner les propos et idées contradictoires. Et quel plaisir de le voir fermer leur bec aux jumeaux quand ceux ci commencent à sombrer dans le ridicule. Bref, heureusement que le personnage de Matthew vient sauver le film et apporter la touche de sincérité et de justesse dont il avait cruellement besoin. C’est d’ailleurs en sa vision des choses que, je trouve, l’on peut trouver un véritable intérêt au film : celui de remettre à plat quelques préjugés, faire réfléchir sur l’attitude assez commune des pseudo intellectuels qui critiquent la politique mais n’osent pas sortir dans la rue, pour qui « un million » veut surtout dire « deux ou trois" et, plus que ça, permet de questionner les convictions de l’époque : crier non à la violence et contre la guerre du Vietnam depuis la France comme si l'on connaissait tout le fonctionnement de l’armée américaine et que se trouvait d’un coté les gentils et de l’autre les méchants avant d’aller violemment attaquer des CRS, crier à la culture et admirer Mao et les soldats rouges qui ne lisent que le livret rouge, se dire anti-télévsion pour être « pur » juste avant d’être ébahit devant une montagne de cartons et ainsi montrer l’incomprehension de sa propre époque tout en se criant « pur ». Au final c’est ce regard étranger qui pousse à questionner, à apporter cette sincérité qui manquait au film, et, au final, quand même lui donner de l’intérêt.

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le 12 août 2016

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