Le temps passe et les justifications n'ont plus lieu d'être... Sifflé, hué à Cannes lors de sa sortie, provoquant dégoût et malaise, Gaspard Noé touche dans le mille. Le réalisateur de Seul contre tous continue son périple de la déchéance et de la bassesse humaines en poussant les potards à leur maximum. Une histoire de viol ultra-violent et de vengeance dans les bas-fonds sordides de Paris qui cache sous ses airs de trip anxiogène une histoire d'amour insoupçonnée.


On peut haïr Irréversible pour justement ce malaise constant qui embrume le long-métrage, pour ses séquences à la limite du supportable, pour son réalisme accru et sa musique déstabilisante. On peut aussi aimer Irréversible parce que c'est osé, maîtrisé, original, unique. Noé utilise tout son savoir-faire et des abuse de techniques dingues pour faire constamment tournoyer sa caméra, usant de stratagèmes ingénieux pour que le spectateur ne voit aucune coupe à ce long plan-séquence et soit plongé dans une spirale infernale.


La bande-son saturée de par Thomas Bangalter (Daft Punk), le montage inversé (le début du film est en réalité le plan final), les cadrages obliques, les plans serrés... C'est dérangeant, déconcertant, hypnotique, faisant partie intégrante du film. Le réalisme avant tout. Noé nous assène de séquences abasourdissantes (celle avec l'extincteur en premier), dévoilant la plus extrême des bassesses commise par l'homme. On reste dans de la fiction, rappelons-le, et la scène du viol démontre de manière certes frontale que les viols sont une réalité et qu'ils peuvent être de cette trempe : inattendus, brutaux, impitoyables.


L'interprétation est d'autant plus vraie que le film a été quasi-tourné sur le vif, Noé souhaitant avant tout une crédibilité palpable, brillamment incarnée par le couple Vincent Cassel / Monica Bellucci ainsi que par un Albert Dupontel aussi abasourdi que le spectateur, comme lui aussi témoin des événements du film. Noé a choisi son thème, l'assume jusqu'au bout et réussie son coup, proposant au final une certaine candeur, un passage inattendu de l'enfer au paradis, un bonheur détruit à l'envers. Un coup de poing magnifique dans la gueule.

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le 6 avr. 2019

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