Jérémy Clapin n'avait jusqu'alors réalisé que des courts-métrages, qui redoublaient d'ores-et-déjà d'inventivité. Une histoire vertébrale ou encore Skhizein évoquent respectivement une romance entre deux personnages affligés et l'histoire d'un homme tellement paumé qu'il se retrouve à quelques centimètres de lui-même. Toutes ces histoires sont bien sûr très imagées, et c'est également le cas de J'ai perdu mon corps, dans lequel on retrouve des thématiques assez similaires aux courts-métrages de Clapin.
Clapin parvient parfaitement à saisir et à faire ressentir les émotions des personnages. C'est une des choses qui m'a le plus frappé dans ce film : par l'acting, les dessins, les musiques, et la poésie qui se dégage du tout, J'ai perdu mon corps touche profondément le spectateur : le film cherche à transmettre les émotions de ses personnages. Mais c'est à double-tranchant : si les images et la poésie ne nous évoquent rien, et si on ne parvient pas à s'illustrer émotionnellement ce que représentent la main, l'igloo, la grue... Alors on peut passer à côté de la générosité émotionnelle du film.
Car oui, ce film est franchement émouvant. Il faut bien admettre que la bande-originale de Daniel Levy n'y est pas pour rien. Les musiques sont intenses et accompagnent toujours avec pertinence les scènes d'aventure ce cette pauvre main perdue, comme les scènes plus poétiques.
L'histoire de base reste toutefois assez simple, et c'est d'ailleurs peut-être cela qui induit une certaine poésie, ainsi qu'une universalité du propos. Sans que je ne sache vraiment pourquoi, on se sent proche du personnage principal... On le comprend. Et en parallèle, on a droit a la fuite surréaliste de cette main tout aussi attachante, car très humaine dans ses gestes et comportements. Ces parties rythment le film, lui évitant ainsi d'éventuelles longueurs.
Je suis heureux de constater que dans ce film, on retrouve toute l'originalité et la beauté des petits univers de Clapin. Pour ceux qui ne le connaissent pas, je conseille de se faire un ou deux court-métrages au préalable, afin de cerner un peu le personnage, puis d'enchaîner sur son unique long-métrage. Franchement, ça se regarde très facilement.