Y a des films qui vous glacent le sang avant même de les avoir vus.
Des films où on se dit qu'on les regardera plus tard, pour le moment, on range le DVD sur l'étagère et on n'y pense plus.
Y a des films qu'on commence à regarder en prenant une grande inspiration, un peu comme avant de plonger dans une eau un peu froide.
Pour moi, I met the devil en fait partie. J'avais adoré le film précédent de Kim Jee Woon (The Good, the bad and the weird, un western-hommage déjanté et rempli de vie), et j'avais hâte de voir son prochain bébé. J'ai repoussé pendant longtemps son visionnage, et l'attente valait le coup. Dans la série des "films-coréens-qui-vous-mettent-la-boule-au-ventre-du-genre-vous-êtes-pas-sûrs-que-vous-aurez-envie-de-manger-pendant-3-jours", le film de Kim Jee Woon rejoint les oeuvres de Bon Joon Ho (memories of murder, Parasite), Park Chan Wook (Old Boy, Sympathy for Lady Vengeance) et autres Hong-Jin Na (the Chaser).
Et bien que ça fasse quelques mois que je l'ai maintenant vu, je garde des souvenirs très très clairs du film. Kim Jeu Woon créé une image glaçante absolument sublime, qui donne l'impression que le film a été imprimé sur du papier glacé de qualité. Ce qui le rend encore plus dérangeant, pour une raison qui m'échappe.
Le grand thème du film reste pour moi le contraste, qu'on trouve à plusieurs niveaux. Contraste entre le chaud et le froid (la neige, le coup de feu), l'impulsion violente et la vengeance préparée, et là où le réalisateur frappe très très fort (à coup de marteau, couteau, tournevis, tout ce que vous voulez qui peut infliger de la douleur), c'est dans le contraste entre les deux acteurs principaux. Là où l'on peut séparer sans problème le bien du mal au début du film, l'humain du monstre, le tourbillon dans lequel on est entraîné nous fait perdre tout repère. Chapeau bas à Lee Byung-hun & Choi Min-sik qui vendent parfaitement ce maelström d'émotions et de torture qui se construit au travers de leur jeu de chat et de souris particulièrement pervers. On est pas loin d'"Itchy & Scratchy"...
C'est une ballade extrêmement violente, étonnamment poétique et dramatique qui attend le spectateur qui décide de se lancer à la flotte avec ce film, qui me fait beaucoup penser au refrain d'une chanson des Grateful Dead:
Set out running but I'll take my time
A friend of the Devil is a friend of mine
If I get home before daylight
I just might get some sleep tonight