Quel gâchis ! Jacky au royaume des filles nous présente une idée ambitieuse, celle d'inverser les rôles de la phallocratie et de placer la gente masculine sous les ordres des femmes. Ce projet prometteur de Riad Sattouf s'inscrit dans la dynamique de son précédent succès Les beaux gosses et s'appuie sur un casting riche et haut en couleurs : on retrouve ainsi des acteurs comme Charlotte Gainsbourg et Didier Bourdon et William Leibghil (SODA) accompagnés par les deux héros des beaux gosses ( Riad Sattouf oblige). Bon, à partir de là, il est difficile d'imaginer un film raté, mais c'est malheureusement bien le cas, et le spectateur s'en rend compte (trop) rapidement. Déjà, le scénario est survolé : il y avait réellement quelque chose à faire, tant dans la satire politique que dans l'exacerbation du ridicule de la situation (domination du genre féminin, les hommes sont voilés). La cause principale de cet échec, c'est que le film manque de rythme : on s'ennuie rapidement, les scènes se suivent sans proposer un spectacle plaisant, la faute à une bande-son qui atteint vite ses limites. D'autre part, Riad Sattouf mise beaucoup trop sur le jeu de ses acteurs, et relègue au second plan l'intrigue (et alors l'intérêt) du film. Les prestations des acteurs sont médiocres, et chacun peine à sortir du lot et apporter le petit plus qu'on recherche dans des films aussi pauvres en contenu. Vincent Lacoste nous livre une pâle copie de son personnage des Beaux gosses et semble ne pas pouvoir s'émanciper de cette image d'ado loser qui lui allait parfaitement dans le film précédent, mais qui ne suffit pas à relever le niveau d'un Jacky au royaume des filles déjà au ras des pâquerettes. Toutefois, il semble que Jacky au royaume des filles ne soit pas un navet, mais plutôt un film trop ambitieux empli d'idées inabouties : le travail sur les décors et les costumes est plus que correct, il apporte de la couleur et du panache à un film qui en manque cruellement. Par ailleurs, on retrouve un clin d'oeil à Cendrillon avec le serviteur mal-aimé représenté par Vincent Lacoste, et le film s'avère potable jusqu'à l'arrivée au palais. Après, difficile de tirer des enseignements de la suite : on assiste à un fourre-tout d'idées assemblées sans queue ni tête qui remet en cause le message extérieur du film, tant politique que culturel. On se demande quelles leçons retenir de cette idée survolée au profit d'un film dénué de saveur et (il faut le dire) sans grand intérêt. De quoi espérer une réaction de Riad Sattouf qui, à partir d'un Jacky au royaume des filles loupé, saura tirer le meilleur de son talent et rebondir sur une oeuvre à la hauteur, on lui souhaite, de nos espérances.

Créée

le 9 juin 2016

Critique lue 1.7K fois

1 j'aime

Critique lue 1.7K fois

1

D'autres avis sur Jacky au royaume des filles

Jacky au royaume des filles
Gand-Alf
6

Cendrillon au bal des couillons.

Second long-métrage pour Riad Sattouf, cinq ans après le succès surprise des "Beaux gosses", qui imagine cette fois une uchronie où les femmes tiennent le pouvoir dans une société totalitaire et où...

le 24 janv. 2015

35 j'aime

Jacky au royaume des filles
Citizen-Ced
6

Chevalin malin, chevalin coquin, je te donne mon destin

En République de Bubunne on vénère les poneys, les hommes rêvent de belles robes tandis que les femmes sont obnubilées par le sexe, le pouvoir et le pognon : de cette excellente idée de départ, Riad...

le 7 juil. 2014

23 j'aime

Jacky au royaume des filles
Contrechamp
4

Jacky au Royaume des Filles : l'arroseur arrosé

La naissance de Riad Sattouf en tant que réalisateur (Les Beaux Gosses, 2009) s’est faite sous les meilleurs auspices : une présentation à Cannes à la Quinzaine des Réalisateurs, près d’un million...

le 26 déc. 2013

23 j'aime

1

Du même critique

Pas un bruit
SimonLesénéchal
5

Une bonne idée qui reste muette

Avec l'idée ingénieuse de placer une femme sourde et muette dans le rôle du protagoniste, Pas un bruit (Hush en anglais) ne manque pas d'éveiller la curiosité. Cela offre en effet de nombreuses...

le 24 juil. 2016

6 j'aime

Little Miss Sunshine
SimonLesénéchal
9

Le voyage initiatique de la famille Hoover

Little Miss Sunshine, c'est l'histoire d'une famille complexe, forcée de voyager ensemble pour se rendre à un concours de beauté, auquel la fille Olive doit participer. L'aventure s'annonce...

le 29 déc. 2016

2 j'aime

Hip Hop Evolution
SimonLesénéchal
9

Aux origines du Hip Hop

Après The Get Down, Netflix délivre une nouvelle série sur la musique des années 70, pour remonter jusqu'aux années 90. Toutefois, cette nouvelle production se focalise sur le Hip Hop et ses...

le 24 déc. 2016

2 j'aime