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Un grand fim pas comme les autres pour une année comme aucune autre. Dès son titre, teinté d'un rejet sociétal aux allures de suicide bourgeois, Je veux juste en finir annonce une couleur - ce qui suivra, ceux qui suivront, cette sorte de trip sauvage et halluciné, de cauchemar existentiel à la fois ultra-esthétique et dénué d'évidences plastiques, personne ne pouvait vraiment s'y attendre - même de la part de Charlie Kaufman, auteur culte des scénarios de Eternal Sunshine of the Spotless Mind, Dans la peau de John Malkovich et réalisateur du très remarqué Anomalisa en 2016.


L'état léthargique dans lequel Je veux juste finir nous tire, la tempête artistique de ses risibles expérimentations font de cet objet non-identifié un moment à part, et peut-être le plus grand étendard du modèle si critiqué de Netflix : à force de donner des cartes blanches aux plus grands, sans cadre et sans contraintes de rythme, on finit par aboutir à de magistrales anarchies : Kaufman investit un espace cinématographique comme on pourchasse un eldorado, bravant la morale et tentant de survivre en terrain hostile où il ne reste plus qu'à créer. A partir de rien. Les structures se délitent, se réinventent, terminent méconnaissables - les codes sont ceux des hors-la-loi, des bandits qui ont tourné le dos au grand écran.


L'écran qui reste, celui de la crise Covid, celui de la crise symbolique de la salle, celui du salon d'un inconnu, celui du chez-soi intime d'un lointain étranger, est finalement l'ultime recueil du cinéaste, qui vient envahir de ses émotions et partager ses dérives mentales les plus folles ; et dans le même temps les plus universelles. Le dialogue, intrusif et pourtant si cotonneux, est le pinacle d'un cinéma solitaire, d'un art qui se vit seul, les yeux dans les yeux. En 2020, Je veux juste en finir est bel et bien un film-monde. Un film qui doute. De lui-même, de l'institution, du couple, de la vie, des enfers. Un film qui doute de ce qu'on nous inculque. Un film qui doute du sens même. Seule certitude : c'est bien ça, le cinéma qu'on peut espérer de demain.

Vivienn
8
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le 3 janv. 2021

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