Lors de la promotion de Jeune et Jolie, son réalisateur François Ozon déclarait : «Les femmes peuvent se sentir proches (de l'adolescente du film), car la prostitution est un fantasme commun à de nombreuses femmes (...) Cela ne veut pas dire qu'elles le font, mais le fait d'être payée pour coucher est quelque chose qui est assez évident dans la sexualité féminine». Il est ensuite revenu sur ses propos. Le problème, c’est que son film, lui, ne peut plus y revenir. Il dit exactement ce que déclarait Ozon à sa sortie.

En gros, le film raconte l’histoire d’une adolescente de 17 ans, fille de bonne famille, qui se livre à la prostitution. Passé le visuel aseptisé, digne d’un téléfilm de luxe pour TF1, le film raconte que la prostitution n’est qu’un fantasme de jeune fille, davantage excitante qu’une vie bourgeoise ennuyeuse qui lui permet de tout avoir. Ce constat se vérifie par la volonté d’Ozon de ne pas dévoiler les motivations de l’héroïne et in fine de ne pas prendre de position morale face à ce qu’il filme, c’est-à-dire le milieu de la prostitution. C’est un choix, mais qui n’explique rien, ne justifie rien, est inutile. Et comme toute mise en scène est affaire de morale, Jeune et Jolie se vautre dans son schéma de départ, l’absence de psychologie- vecteur de provocation -se révélant très vite être une esbroufe.

Cette absence de point de vue est très choquante, et trouve son climax lors de la dernière demi-heure. Ainsi, l’héroïne découverte, revient à sa vie adolescente. Ozon filme donc une scène de soirée étudiante comme une scène de débauche sordide où se mélangent drogue, sexe et alcool. Ce que dit Ozon à ce moment, c’est que cette soirée est la même chose que ce que représente la prostitution, peut-être même pire, puisqu’après ce retour express, Isabelle rallumera son portable « de travail » pour voir les textos reçus de ses anciens clients. La prostitution est en résumé, une drogue, un jeu, une échappatoire à une vie morose et tout ce constat est sorti avec une pose d’auteur insupportable. Jeune et Jolie est à classer parmi ces œuvres françaises pseudo-intellectuelles, coexistant avec la comédie populaire, avec au milieu des films intègres et intelligents, comme ceux de Guillaume Brac par exemple, qui n’ont pas la promotion méritée.

Godard déclarait à la sortie de Regarde la mer, moyen métrage du zozo Ozon, que le film aurait dû s’appeler « Regarde la merde. ». Dommage, ça ne marche pas pour Jeune et Jolie
Tanguydbd
1
Écrit par

Créée

le 10 janv. 2014

Critique lue 423 fois

3 j'aime

Tanguydbd

Écrit par

Critique lue 423 fois

3

D'autres avis sur Jeune & Jolie

Jeune & Jolie
EIA
5

Peut mieux faire

Je sens déjà que ma critique va être loin de faire l'unanimité, mais je n'ai pas aimé ce film. La jeune Marine Vacth est certes très jolie, elle a une ligne d'interprétation qu'elle tient jusqu'au...

Par

le 23 août 2013

112 j'aime

11

Jeune & Jolie
Sergent_Pepper
8

"Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan / La douceur qui fascine et le plaisir qui tue."

Après l’été de ses dix-sept ans où Isabelle perd sa virginité sans passion, considérant que « C’est fait », l’automne débouche directement sur une passe. Pas de transition, pas d’explication, pas de...

le 2 févr. 2014

108 j'aime

27

Jeune & Jolie
PatrickBraganti
2

La putain et sa maman

Avec son nouveau film, François Ozon renoue avec sa mauvaise habitude de regarder ses personnages comme un entomologiste avec froideur et distance. On a peine à croire que cette adolescente de 17...

le 23 août 2013

89 j'aime

29

Du même critique

Conte d'été
Tanguydbd
10

Critique de Conte d'été par Tanguydbd

Quand Conte d’Eté sort sur les écrans en 1996, Rohmer a 76 ans et il est pourtant impossible de le deviner, pour ceux qui ne le connaitraient pas, à la vision du film. A quoi cela tient pour qu’un...

le 24 août 2014

26 j'aime

1

La Vénus à la fourrure
Tanguydbd
3

Critique de La Vénus à la fourrure par Tanguydbd

Roman Polanski est l’auteur de deux des plus beaux films au monde, « Rosemary’s Baby » et « le Locataire », ainsi que deux autres chefs d’œuvres inouïs et flamboyants que sont « Tess » et « Chinatown...

le 17 avr. 2014

11 j'aime

2

L'Invraisemblable Vérité
Tanguydbd
7

Critique de L'Invraisemblable Vérité par Tanguydbd

Cette critique contient des révélations quant à l'intrigue. Il faut le rappeler et le marteler : non, les films américains de Fritz Lang n’ont rien à envier à sa période allemande. Souvent taxés de...

le 11 avr. 2014

9 j'aime