John Wick 2, ou le syndrome du Blockbuster américain

 Lors d’une critique de film, la question qui plane est toujours la même : « qu’est-ce qu’un bon film ? ». Cette question n’a de cesse de trotter en ma tête concernant *John Wick 2*. Ce film s’inscrit en effet dans la volée des films d’action blockbusters, qui n’ont pour intérêt que de nous faire passer le temps, ou, comme dirait Pascal, de nous faire oublier que le temps passe et nous rapproche de la fatalité ; mais ce film se distingue aussi par certaines audaces. C’est pourquoi la question se pose : Doit-on ne juger un film que sur sa réalisation ?  Le scénario est-il constitutif de la qualité d’un film ? 

Cependant, il ne faut pas négliger une autre partie importante du film, qui est son ancrage dans le cinéma américain, et, plus vastement, le cinéma occidental. En effet, on peut voir, avec la multitude actuelle de films de super-héros, et autres films d’actions, que la représentation impérialiste américaine ne cesse de planer sur les œuvres occidentales.


 C’est pourquoi, afin d’analyser le film, il sera question de la réalisation et de la mise en scène du film (I.), puis de son scénario (II.), avant de traiter du sous-texte politique de l’œuvre (III.)
En théorie, aucune partie du scénario ne sera dévoilée, permettant aux personnes qui n’ont pas vu le film de se renseigner sur l’œuvre.

I. L’audacieuse mise en scène de John Wick 2


 Je ne comparerai pas *John Wick 2* au premier volet, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, je n’ai pas grand souvenir du film, et, ensuite, car une œuvre doit, je pense, s’apprécier seule, et ne doit pas exister au travers d’autres œuvres. 
Le cadrage du film est relativement bateau, aucun cadre ne saute aux yeux ni n’est fulgurant. D’après moi, les grandes forces du film résident dans certaines idées de mise en scène, et sur certains plans de caméra.
Concernant la mise en scène, j’ai été agréablement surpris par le film, avec par exemple les polices d’écritures des messages écrits à l’écran, qui arrivent à faire décrocher au spectateur un sourire à chaque fois. Cet exemple n’est pas le seul, mais je n’ai pas envie de tout dévoiler concernant le film, de peur de gâcher des petites surprises sympathiques. Le film arrive à avoir une mise en scène à la limite du burlesque sur certains points, fait très agréable dans un film d’action du genre.
Quant aux plans de caméra, lorsqu’il n’y a pas de scène d’action pure, rien n’est à relever en particulier. Cependant, lors de certaines scènes de combat, le réalisateur nous fournit des petits plans-séquence bien sympathiques. Les plans n’ont cependant rien d’extraordinaire ou de révolutionnaire. Alors que dans certains films comme *Au revoir là-haut* j’ai été radicalement surpris par certains plans, ici, j’ai trouvé les plans rafraichissants.
Concernant la façon de filmer les combats, rien de novateur, mais comme pour *Equalizer 2,* les combats ont un aspect jouissif. Cependant, là où *Equalizer 2* se complait dans la simplicité et la médiocrité des plans qu’il emploie, *John Wick 2* arrive à « relever le niveau ».
Maintenant que j’ai offert mes louanges à *John Wick 2,* il est temps d’entrer dans les choses qui fâchent.

II. De la simplicité du scénario


 Là où un réalisateur comme Martin Scorsese mise tout sur le scénario, le réalisateur de *John Wick 2* a dû oublier cette étape. Il est concevable que rédiger un scénario novateur soit chose difficile, mais de là à créer un scénario bateau, d’une simplicité infantile, et qui tient sur une feuille format A5, il faut y aller. Ce problème rentre selon moi non pas dans la responsabilité du scénariste, mais dans la responsabilité des studios, qui veulent absolument des scénarios des plus simples pour complaire au public qu’il juge abruti (à tort ?) et incapable de suivre une progression un peu plus complexe.
Cependant, selon moi, la force d’un film peut se trouver hors du scénario. Prenons *Reservoir Dogs* par exemple, le scénario est extrêmement simple, et pourtant, le film arrive à être excellent et captivant. Cependant ici, rien n’aide le scénario, pas même le montage.
Cependant, si ce genre de scénario existe, c’est aussi à cause du public.

III. De la remise en cause de l’impérialisme américain


 Le public français ne cesse de me déboussoler. Il a le chic pour critiquer le système mais pour continuer à s’y morfondre. Par exemple, n’avais vous jamais entendu des « y’en a marre de ces films marvel qui sortent à la pelle » venant de gens qui vont au cinéma voir chacun de ces films ? Ou des « Disney fait n’importe quoi de Star Wars » mais qui attendent tout de même avec impatiente les nouveaux films ?
En réalité, il en va de même pour l’implantation de l’impérialisme américain dans le cinéma. Alors que beaucoup aiment à dire qu’ils aimeraient des scénarios plus travaillés et des personnages plus profonds, ils vont regarder à la pelle les films américains qui présentent, comme ici, des héros valeureux sans aucun défauts, ou alors des défauts excusables, où le mal n’est là que pour justifier le bien. Là où par exemple Peter Jackson a, je trouve, relativement bien réussi à tamiser son propos dans son adaptation du *Seigneur des Anneaux*, ici, ou comme dans tous les films Marvel/DC, les héros n’ont aucuns défauts, et s’ils en ont, sont excusés. Là où le cinéma non-occidental sait nous offrir des personnages bien plus intéressants, sur ces points, le public occidental se plaint encore une fois de ce cinéma.
Le public devrait donc faire un choix : va-t-il continuer de se plaindre des films mais continuer à les voir, ou va-t-il prendre une décision ? En réalité, chaque décision se vaut, arrêter de voir ces films, comme continuer à les voir, mais les juger comme ils sont et arrêter de se plaindre dans ce cas. Dans chacune des solutions, il ne faut pas avoir honte de ses goûts, même si la question de savoir s’ils se valent tous est intéressante, rappelez-vous que l’on peut aimer le cinéma japonais comme ne pas l’apprécier, tout comme le cinéma français, mais que, comme tout, il faut en avoir regardé pour juger.

Conclusion


 En conclusion, John Wick est un bon divertissement où vous ne verrai pas le temps passer, même si le sous-message du soft-power américain commence à devenir lassant à la longue. C’est donc un film duquel je recommande le visionnage, pour ses petites idées de réalisation sympathiques, et pour le bon moment que vous passerez, qui vous fera oublier votre mortalité et votre funeste destin (merci Pascal pour ces idées guillerettes).
Prenez soin de vous, allez voir des films, ciao (il va vraiment falloir que je trouve une manière de dire au revoir).
thomas_24
7
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le 3 janv. 2019

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