Clint, ce bourreau des enfants
A Hollywood, il est rare de voir un film qui met en scène des gosses se faisant tuer. Clint Eastwood est l'un des rares à faire exception. Encore aujourd'hui il montre des enfants brutalisés (Mystic River par exemple). Et lorsque ce ne sont pas des enfants en bas âge, ce sont de jeunes gens pris sous la tutelle du vieux singe. Hilary Swank dans Million Dollar Baby, par exemple. Je me demande quel traumatisme Clint a pu vivre étant enfant pour qu'il mette en scène la perte d'un innocent aussi souvent (et toujours face à la figure du père qui ne peut rien y faire) ?
Josey Wales hors-la-loi est un western intéressant. Clint propose un regard cru sur la guerre entre fédérés et confédérés, une guerre qui touche à sa fin, mais qui fait toujours des victimes. L'histoire passe d'ailleurs un peu à la trappe. C'est bien le plus gros reproche qu'on puisse faire au film. Clint tourne autour du pot et retarde le plus possible la vengeance en insérant quelques digressions ici et là. Apparemment, dans le livre dont le film est issu il n'y a pas autant de sous intrigues. Ce choix de Clint n'est pas mauvais, mais ça perturbe le rythme de la trame qui se voit ralentie considérablement. Les enjeux sont presque mis sur pause le temps de nous brosser le portrait de personnages fabuleux. C'est d'ailleurs là la grande force du film : des personnages ! Ils sont riches et exploités plus qu'on ne l'aurait espéré ; tous ces dialogues entre eux pendant que Clint fait son show apporte un petit plus réaliste.
La mise en scène est bonne. On reconnaît le style Eastwood, encore fort influencé par la caméra épaule de Don Siegel, mais déjà porté par des clairs obscurs qui font sa marque de fabrique. Les acteurs sont très bons et très bien dirigés. Quand on regarde les featurettes, on se demande comment Eastwood peut obtenir un tel résultat vu le bordel durant le tournage. Il y a d'ailleurs quelques petits défauts dans les cadrages. Je pense notamment à cette belle scène où Josey attaque des brigands en contre jour. Dans chaque plan le soleil est à un endroit différent, les ombres bougent tout le temps ; ça n'a rien de cohérent, mais heureusement ça ne gêne pas à la compréhension de l'action.
Digressons. En voyant que Sondra Locke était encore dans un film de Eastwood, j'ai décidé de checker sa page IMDb. J'apprends que la donzelle fut la compagne de Eastwood pendant plus de 10ans. Puis vint la rupture. Brutale. J'en suis très surpris. Clint a toujours été décrit par ses amis comme étant quelqu'un de réservé, timide, gentil et gentleman avec les dames. Et là j'apprends que pendant que Sondra était partie sur un tournage, il a fait changer toutes les serrures de la maison et a déménagé ses affaires... il l'a prévenue par lettre pendant son séjour. De même il semble avoir dit beaucoup de méchantes choses sur elle. Je n'ai malheureusement trouvé aucune trace de ces propos. Et il n'est pas spécialement bavard à ce sujet dans ses interviews, du coup nous n'avons qu'une version des faits. Peut-être que Sondra est folle comme le personnage féminin de Play misty for me? Ou bien peut-être qu'il est réellement un salaud avec les femmes. Il est amusant de constater également qu'il s'amuse au moins à deux reprises à mettre en scène son viol (ce film-ci et the gauntlet). D'ailleurs le viol de l'indienne dans ce film semble être une vraie promenade comparé à la violence de la tentative de viol de Sondra. C'est bizarre tout ça.
Bref, Josey Wales est un film très intéressant pour ses personnages mais aussi pour le portrait qu'il brosse d'une époque en plein changement. Dommage que le scénario ne soit pas un peu plus solide.
