Quand la sortie d'un film est repoussée de plusieurs mois, ce n'est jamais bon signe. C'est souvent dû à des projections test catastrophiques, ou la production qui ne croit plus au film et réclame un nouveau montage. Elle ne peut abandonner le film, vu son coût : 175 000 000$ et va donc le sortir, à une période ou elle estime la concurrence moins dure. Sauf que le film, s'il est toujours aussi mauvais, après de multiples montages, cela ne changera pas vraiment les résultats. C'est ce qui arrive à "Jupiter Ascending", comme ce fût le cas pour "Cloud Atlas", mais ce dernier avaient de nombreuses qualités et mérité un meilleur sort, pas celui-ci.

Née en pleine mer, Jupiter Jones (Mila Kunis); orpheline de père; est promis à un destin exceptionnel. Adulte, elle vit toujours dans sa famille russe, récure les toilettes et n'aime pas sa vie. Mais elle possède en elle, l'adn qui en fait, une des héritières de l'univers. Elle va faire la rencontre de Caine (Channing Tatum) venu la sauver, d'une mort prématurée. Elle va se retrouver au milieu des manigances de la dynastie Abrasax, voulant sa main et sa mort, pour obtenir son héritage.

La tentative des Wachowski de créer un univers original est intéressante. Dans une période ou pullulent biopics, suites, adaptations ou inspirés de faits réels, on peut saluer l'initiative de sortir de la norme et surtout, facilité actuelle. Mais cela ne fait pas forcément un bon film, la faute à un scénario se voulant dense, mais au final, des plus simpliste. De même qu'un casting, encore moins à la hauteur, avec un épouvantable Eddie Redmayne, un des méchants les plus risibles de l'histoire du cinéma.

Le cinéma des Wachowski ne laisse jamais indifférent, mais après les réussis "Bound", puis "Matrix" dont l'influence est encore palpable, 15 ans plus tard. Force est de constater, que la suite est plus que décevante : Matrix Reloaded, Matrix Revolutions et Speed Racer. Puis l'embellie "Cloud Atlas", une fresque ambitieuse, pas totalement réussie, mais on se dit, qu'ils se sont repris en main et vont nous offrir, un superbe space opera. Ce ne sera malheureusement pas le cas.
La forme est sublime, les plans sont magnifiques, diverses images collent à la rétine. C'est esthétique, les décors sont grandioses, tout comme les costumes, on a l'impression de se retrouver dans un défilé de mode, en plein fashion week, mais pas forcément de bon goût. La course-poursuite entre les gratte-ciels de Chicago, est un bijou visuel et d'action. On en prend plein les yeux et forcément, on s'attend que la suite soit du même niveau.
Mais en dehors de cette scène, le reste n'est pas aussi enthousiasmant. Dès le début, il y avait cette naïveté, qui se faisait ressentir, dans la rencontre des parents de Jupiter. Puis, le décès de son père, si facile et ridicule, pour en faire une orpheline. Enfin, Jupiter répétant inlassablement que "sa vie est nulle", comme une adolescente de 15 ans. Les dialogues ne volent pas haut, au contraire des vaisseaux spatiaux et des chaussures de Caine. On a l'impression d'être dans la version futuriste de "Twilight", surtout que l'idylle entre Jupiter et Caine est convenue, permettant à l’adolescente de se retrouver dans cette pauvre Jupiter, récurant les toilettes. Jupiter, digne descendante de Cendrillon, qui va rencontrer son prince, Caine mi-homme, mi-loup, qu'elle va comparer à un chien, dans un moment censé être drôle. Car oui, les Wachowski ont décidé de glisser des notes d'humour dans leur film. Là aussi, ça ne marche pas, cela tombe souvent à plat. A l'image de cette scène de bureaucratie, hommage au "Brazil" de Terry Gilliam, qui fait une apparition. Elle est en décalage avec le reste, pas forcément mauvaise, mais pas à sa place.
Puis il y a Mila Kunis, on a pas l'impression qu'elle croit à son rôle, à son destin. Je la comprends, moi aussi je n'y crois pas, le film ne donnant jamais la pleine mesure de son potentiel, perdu dans un scénario en apparence dense. Il faut dire que ses adversaires sont catastrophiques : Douglas Booth et surtout Eddie Redmayne. A croire que les Wachowski étaient plus concentrés sur l'image, oubliant de diriger leurs acteurs.
La famille russe de Jupiter est une caricature, gueulant à outrance "Par les couilles de Staline". Les scènes intimistes; souvent à table; en sont le parfait exemple. Cela rejoint, le jeu des acteurs, ou la plupart cabotine, l'excès visuel, se répercutant aussi à ce niveau. Il en est de même avec la dynastie Abrasax, avec ce fameux discours des riches suçant l'âme des pauvres, en l’occurrence notre planète. Elle est un champ d'ADN humain à moissonner, pour leur permettre de garder leur jeunesse. Certes, c'est une bonne idée, il y en a d'ailleurs plusieurs intéressantes, mais avec autant de mièvrerie dans les dialogues et avec l’idylle entre Jupiter et Caine, qu'elles s'y perdent.
SPOILER : Finalement, la seule surprise reste Sean Bean, toujours en vie à la fin du film et ça, c'est sacrément original!

Les Wachowski se sont servis dans diverses œuvres : Dune, Brazil, Cendrillon, Star Wars, entre autres, pour créer un univers à part. De bonnes influences, qui ne fait pas un bon film. Le pari n'est pas réussi, c'est vraiment dommage, car le cinéma a besoin de réalisateurs, qui ont pour ambition d'offrir autre chose, de faire des tentatives, pour surprendre, comme ils l'avaient fait avec Matrix. Ils sont doués derrière la caméra, moins au scénario. Avec un auteur adhérant à leur monde, ils pourraient de nouveau atteindre des sommets, j'aime le croire.
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le 9 févr. 2015

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Laurent Doe

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