Purée, vraiment, les Wachos ne me laisseront jamais le luxe de les détester tranquillement, en restant sur la dégueulure esthétique qu'étaient les suites de Matrix - que je me suis regoinfré avec douleur et saignements oculaires (et anaux), en postulant qu'il pouvait y avoir quelque chose derrière, mais rien à faire, l'esthétique loupée à l'obscène, la Rave des Pouilleux, les parti-pris esthétiques, le propos dilué, le ridicule global, c'est trop, beaucoup trop pour la dose d'indulgence dont j'étais prêt à faire pourtant preuve -. Non, les Wachos passent leur temps à forcer au repositionnement, à travers leur egotrip parfois malvenu, parfois salutaire, parfois les deux à la fois - leur série Sense8 et le Cloud Atlas sont deux symptômes plus ou moins heureux de cette ambivalence -, et, indéniablement on un propos, à chaque fois, systématiquement, fut-il une métaphore bien lourde des difficultés de positionnement genré de Lana pour l'egotrip parsemé de quelques bonnes idées Sense8.


Les Wachowskis ont un angle d'attaque, c'est sûr.
J'ai eu la paradoxale chance de voir Jupiter Ascending dans de très mauvaises conditions la première fois. Paradoxale, car grace aux dites-conditions (copie de merde, son mal réglé...etc), je n'ai pas pu me prendre l'effet "waou" de la démesure de l'ensemble, et simplement subir une histoire composée strictement des clichés les plus gras du cinéma spectaculaire, entre la Fille au quotidien commun et au Destin Unique, la réutilisation en boucle du "Héros qui te sauve à la Dernière Seconde"...etc, tout est là dans sa version la plus crasse.
J'ai entre temps vu le Vlog de Durendal qui justifie sa Wachomanie en affirmant "que le film est mauvais uniquement parce que les Wachovskis voulaient qu'il soit mauvais, c'est une stratégie...", et j'y ai vu l'aveuglement d'un fanboy prêt à touiller une flaque d'eau pour la déguiser en lac profond tant qu'à la surface se reflétait le nom de la fratrie Wachowski. C'était un peu triste.


Mais j'ai eu, suite au visionnage de son top (oui, je suis son Vlog alors que je suis en désaccord avec lui 9 fois sur 10, car son aveuglement façon "tête dans le guidon", en raison de ses études, un peu à la façon d'un étudiant en deuxième année de psy qui aurait l'arrogance d'un Maître des Clés de la Psyché humaine, fait de son approche souvent univoque du cinéma une approche bien différente de la mienne, et permet souvent de mettre à jour des choses qui m'échappent, généralement parce qu'elles ne m'intéressent pas ou sont secondaires à mes yeux, mais pas systématiquement, loin de là), envie de revoir le film. La reformulation de son propos m'avait-elle convaincu ? - car on est passé du film mauvais fait exprès à un film qui réussit dans sa démesure à offrir un paradoxe : Jupiter est l'élue....comme tout le monde, une élue parmi tous les autres qui attendent dans l'enfer bureaucratique d'une scène à cheval entre Brazil et les 12 travaux d'Astérix -, ou simplement la bête envie de voir des dinosaures bipèdes et du gros spectacle qui tache tout en étant finement ciselé, une portion de 5eme élément sans le virus Besson - qui partage avec les Wacho l'ego surdimensionné en ayant sacrifié toute trace larvaire de talent sur l'autel de sa carrière de producteur (et ce n'est pas cette blague mal léchée qu'est son 2001 personnel, reposant tout entier sur la performance exemplaire de la belle et glaciale Scarlett Johansonn, et sur la seule bonne idée émanant de Besson : lui donner une durée décente (excellent choix, le film donnant l'impression de faire une demi heure de plus) qui va réhabiliter Besson en tant que cinéaste à mes yeux, quand tout ce que je peux accorder au film, c'est de m'avoir diverti malgré sa bêtise formelle crasse ("oh, elle est prise au piège, alors je vais ajouter des images de prédateurs"...Besson, je conchie) (plusieurs fois). Mais je divague, je me disperse...


Il y a néanmoins une raison à cette digression : le dit-Durendal est à genoux devant le dernier Besson, et Besson en général, comme il l'est devant les Wachowskis. Et ça suffit à me distancier de son propos, généralement, tout en acceptant les bonnes idées et les fulgurances du garçon malgré ses fautes de goût à répétition (troll intended).


Bref, j'ai eu raison d'écouter cette voix nuancée car ça m'a permis non seulement de découvrir la surenchère du film à sa juste valeur, qui réussit à enterrer la prélogie Star Wars en terme d'inventivité et de grandiloquence, qui dégueule une avalanche de détails de génie dans le moindre design de la moindre ailette du moindre vaisseau, qui offre une VRAIE surenchère au point que tous les repères de l'héroine se perdent, que le sens des échelles se perturbe pour ne laisser qu'un sentiment de vide face au gigantisme assumé du film. Bref, une fois n'est pas coutume, Durendal avait raison. 'Chié!


Même la kitscherie nauséeuse d'idées comme les rollers de Tatum est assumée avec audace, donnant lieu à des chorégraphies pensées pour ce gadget! Bref, rien n'est là au hasard, et même le final en devient presque Sisyphéen, façon Camus.


Bref, en plus d'offrir visuellement ce qu'on était en droit d'attendre de la prélogie, ce que l'on voir vaguement entre les lignes dans John Carter, bref, d'offrir un vrai spectacle moderne, tout en puisant dans un nombre d'influences qu'il serait vain d'énumérer - notamment la grandiloquence, l'étiquette et la paranoïa justifiée échappée directement des synapses de Frank Herbert -, les Wachovskis osent, quitte à diviser, quitte à être pris pour les mégalomanes qu'ils sont indéniablement, parce que, bien que ça m'arrache une couille de l'admettre, le cinéma des Wachos a quelque chose à dire, que le propos laisse indifférent ou non.

toma_uberwenig
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le 17 janv. 2016

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