Féérie du chaos
Dans la galaxie en triste expansion du blockbuster, il est recommandable de revenir de temps à autre aux fondamentaux : pour savourer, et comprendre à quel point le savoir-faire en terme de cinéma...
le 12 janv. 2018
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Le milliardaire John Hammond a réussi à recréer les dinosaures disparus depuis des millénaires et il a l'idée folle d'en faire les attractions d'un parc construit sur l'île d'Isla Nublar,au large du Costa Rica.Pour faire financer son projet,il organise un séjour sur l'île où il convie un avocat,qui s'est adjoint les services d'un mathématicien,et un couple de paléontologues.Mais une tempête arrive,le responsable de l'informatique se barre avec de l'ADN de dinos et les grosses bébêtes franchissent les clôtures devenues inopérantes.Le cauchemar peut commencer.On avait déjà vu des films avec des animaux préhistoriques,mais jamais des comme celui-ci.Steven Spielberg,qui réalise et coproduit avec Universal,a en quelque sorte réinventé le genre et personne n'a fait mieux depuis.Il adapte ici un roman de Michael Crichton paru en 90,transformé en scénario par David Koepp,le futur réalisateur de "Fenêtre secrète" ou "Hypnose",et Crichton lui-même.Celui-ci était un des piliers de la pop culture et du nouvel Hollywood.Il était romancier,scénariste,mais également un excellent cinéaste à qui l'on doit quelques classiques du fantastique tels que "Mondwest","Looker" ou "Runaway".La musique,qui accompagne magnifiquement la tension permanente de l'histoire,est composée par l'immense John Williams,celui des "Star Wars" ou des "Indiana Jones",qui signe un score délicieusement stressant.Quant à Spielberg,il fait un sans-faute en menant son récit avec maestria.Il alterne subtilement scènes calmes et attaques furieuses de sales bestioles terrifiantes et prend le temps de poser et creuser ses personnages,ainsi que de tisser les liens qui les unissent.Le résultat est un vrai régal,Steven faisant insensiblement monter la pression tout au long du film,et il est grandement aidé par les effets spéciaux qui présentent de manière bluffante ces espèces disparues qu'on croirait réelles.Le réalisateur utilise à merveille les décors sauvages de l'île hawaïenne de Kauai où a eu lieu le tournage,ainsi que la variété des protagonistes et des animaux.Ces derniers sont habilement présentés en commençant par des espèces inoffensives telles que le brachiosaurus ou le triceratops,avant de passer progressivement aux choses sérieuses avec les horribles tyrannosaures ou vélociraptors.Des scènes dures se succèdent,des mecs se font bouffer tout crus,on escalade une clôture alors que le courant va être remis,des enfants sont traqués par des raptors dans une cuisine et on a droit aux atroces séquences de nourriture des monstres,garanties sans agrément de la SPA.Le chaos s'installe inexorablement et les auteurs dénoncent ironiquement la folie,la cupidité et la mégalomanie d'humains persuadés de pouvoir contrôler des forces qui pourtant les dépassent.Hammond est bien sûr le catalyseur du désastre.Son projet était dingue et son choix d'une île tropicale peu pertinent car il aurait pu se douter que construire son parc dans un couloir à ouragans n'était pas l'idée du siècle.Le bonhomme est cependant touchant car,plus que l'appât du gain,c'est la passion des animaux et les défis à relever qui l'animent.Répétant sans cesse "j'ai dépensé sans compter",il raconte qu'il a autrefois débarqué sans le sou de son Ecosse natale et qu'il a débuté avec l'arnaque du cirque de puces.Alan Grant et Ellie Sattler ne savent pas trop s'ils approuvent ou non Hammond.Ils sont dubitatifs face à ce projet mais sont aussi fascinés par ces dinosaures dont ils sont habitués à ne découvrir que des ossements,sans parler du fait qu'ils dépendent un peu du vieil homme qui sponsorise leurs recherches.D'autre part leur couple est perturbé par le désir d'enfant d'Ellie alors qu'Alan déteste les gosses,ce qui nous vaudra des scènes très drôles,le scientifique étant contraint de se coltiner les deux petits-enfants d'Hammond qui eux aiment beaucoup Grant.Le matheux Malcolm,obsédé par la théorie du chaos,est totalement opposé à cette idée de parc et le fait savoir avec un humour insolent."J'en ai marre d'avoir toujours raison",dit-il,et effectivement c'est le seul à se montrer lucide quant à la catastrophe à venir.Il y a aussi un informaticien félon qui s'estime sous-payé et mésestimé qui vole des échantillons d'ADN pour les vendre à la concurrence et un avocat-conseil d'abord défavorable aux délires d'Hammond et qui change radicalement d'avis en découvrant la mine de pognon envisageable.Quant à la fabrication des dinosaures,elle parait improbable.Des généticiens ont récupéré un moustique antédiluvien incrusté dans de la pierre,et il se trouve que l'insecte aurait piqué des dinos,et que donc il renfermerait leur sang qu'on a donc isolé et reproduit.C'est improbable certes,mais peut-être pas impossible,en tout cas ce n'est pas dépourvu d'une certaine logique.La distribution est au diapason avec des acteurs marquants qui habitent parfaitement leurs personnages.Richard Attenborough,à la fois madré et naïf,rend Hammond presque poétique.Sam Neill campe idéalement un Grant grognon mais au fond sympa.Laura Dern est enthousiaste et séduisante dans le rôle d'Ellie.Jeff Goldblum,en mode rock-star,est un Malcolm drôle et cynique.Les enfants Ariana Richards et Joseph Mazzello ne sont pas énervants et font bien le job dans un contexte difficile.Wayne Knight est vraiment très bon en traître désagréable et déterminé et Bob Peck a de l'allure en garde-chasse expérimenté.Martin Ferrero est solide en avocat faux-jeton et Samuel Jackson gouleyant en technicien fumeur.Il y a même de petites apparitions de l'excellent latino Miguel Sandoval et de l'asiatique B.D. Wong.A ce propos,on remarque que Wong reprendra le rôle du Dr Henry Wu dans la trilogie "Jurassic World" entre 2015 et 2021.
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le 28 avr. 2021
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