Web-Film Amateur

Kaamelott - Premier Volet est finalement dans la moyenne de tous les films adaptés d'une websérie. Soit un film d'amateur utilisant très mal son budget et sur lequel la fanbase se paluche sans ménagement, lui pardonnant sans problème des défauts qu'ils n'auraient jamais concédé à un autre long-métrage.

Si le budget plus conséquent se fait clairement sentir sur tous les aspects techniques, avec des costumes plus travaillés, des décors grandeur nature et une magnifique BO orchestrale composée et dirigée par Astier lui-même ; ce n'est malheureusement pas le cas pour la réalisation. Car louer une caméra qui tourne en 1500k c'est bien, mais si c'est pour filmer des champs-contre-champ en gros plans mal cadrés pendant les trois quarts du bousin, je vois franchement pas l'intérêt.
De toute façon, il suffisait de revoir le Livre V pour s'en apercevoir. Alexandre Astier est un piètre réalisateur et sa mise en scène est ici, au mieux quelconque, au pire indigeste. A l'image de ce ridicule combat final à base d'SFX made in After Effect, rappelant les """"meilleurs""" moments de la trilogie Noob, avec laquelle le film Kaamelott partage d'ailleurs pas mal de points communs. L'une de ses ressemblances étant bien évidemment le manque d'accessibilité à un public non-initié.

En effet, le film sortant 12ans après l'arrêt de la série, Astier avait la lourde tâche de réintroduire un univers et des personnages ayant évolués sur une dizaine d'années, tout en faisant avancer l'intrigue de sa saga et en ouvrant son œuvre à un nouveau public qui n'aurait pas connu Kaamelott au moment de sa diffusion. Pari difficile qui n'a pas vraiment été relevé.
Face à toutes ces contraintes, l'auteur décide de concentrer le scénario autour de la réunification de tous les compagnons d'Arthur dispersés aux quarte coins du royaume et unissant leurs forces pour poutrer le traître Lancelot hors de la couronne.
Choix habile lui permettant de réintroduire tous les protagonistes de la série et de conclure l'arc entamé dans les dernières saisons, le tout en fournissant un enjeu fort et une résolution satisfaisante pour le spectateur.

Le problème c'est que le scénario devient rapidement prétexte à caser le plus de personnages possibles à l'écran, quitte à recourir pour cela à des facilités d'écriture ou à digresser dans des scènes dialoguées inutiles. Ajouté à ça, un montage épileptique avec en moyenne un cut toutes les dixièmes de secondes, renforçant la sensation d'un long-métrage chaotique qui préfère enchaîner les saynètes de café théâtre à 100 km/h, sans presque jamais se poser 5 secondes pour faire avancer l'histoire, instaurer une ambiance ou développer au moins les personnages principaux.

Alors maintenant, mettez vous dans la tête du spectateur lambda qui n'a jamais vu un épisode de Kaamelott. Certes, il va comprendre l'intrigue dans sa globalité puisqu'elle demeure assez simple, mais quand la majorité de l'humour et des enjeux reposent sur le background des protagonistes ou le lore de l'univers et que ceci n'est jamais correctement présenté dans le film... Ça me paraît impossible qu'un non initié puisse se sentir impliqué dans la quête d'Arthur, s'attacher aux héros ou être pleinement réceptif aux gags.

Heureusement pour moi, j'aime cette série. J'avais même pris l'initiative de me faire l'intégrale avant la sortie du film. Je mentirais donc si je disais ne pas avoir eu un plaisir certain à revoir tous ces talentueux comédiens sur grand écran, interprétant leurs rôles à la perfection dans des dialogues ciselés digne de Michel Audiard.
Malgré tous ces défauts, ce premier volet regorge de beaux moments de comédie qui m'ont fait rire comme peu d'autres films sortis cette année. On y retrouve tout ce qui fait l'essence de Kaamelott, tant est si bien que n'importe quel fan y trouvera forcément son compte et ressortira de la salle avec la sensation d'avoir passé un bon moment. Pas étonnant qu'un nombre significatif de spectateurs l'ait revu 1, 2, voire 204 fois en moins de 3 mois.

Et c'est sans doute ce qui explique les retours plutôt enthousiastes de la fanbase.
Sur Sens Critique, si les fans lui mettent rarement en dessous de la moyenne, il suffit de lire leurs critiques pour constater que beaucoup ne sont pas dupes de ses nombreuses failles, mais considèrent que cela n'entrave pas le plaisir des retrouvailles, ce que je peux aisément comprendre.

Mais quand-même, n'est ce pas triste de revoir à ce point nos exigences à la baisse ? Si nous étions si nombreux à attendre le projet avec curiosité, c'est parce que nous voulions que Kaamelott révolutionne le cinéma français comme il avait révolutionné la TV de son temps. On espérait alors que le médium cinématographique puisse enfin permettre à Astier de concrétiser ses ambitions narratives en réalisant un vrai film de Fantasy ambitieux et singulier.
Tout ça pour aboutir à un enchaînement de saynètes ne racontant quasiment rien et que seuls les fans pourront vraiment apprécier ? A ce moment là, pourquoi transposer la licence au cinéma sans jamais utiliser l'étendu de ses possibilités ? Et quel intérêt de faire un film si c'est pour conserver une écriture de Shortcom ?

Je reste ceci dit confiant pour la suite de la saga. Maintenant qu'Astier a réintroduit son univers et ses personnages, il a le champ libre pour amener son histoire beaucoup plus loin. Mais comme pour Fabien Fournier, ce n'est pas lui rendre service que de surestimer la qualité du film en minimisant toutes ses failles. Au contraire, c'est le meilleur moyen de le conforter dans sa position et faire en sorte qu'il ne s'améliore jamais.