Kick-Ass c’est la transformation de Dave de prime abord. On le voit d’abord dans sa vie normale, sa vie rangée de lycéen banal dont la plupart se contente. Il se fait racketter, il est faible, ça en est triste. Puis il s’achète un costume ridicule vert et jaune (de plongée qui plus est) et commence à vouloir se faire respecter par les deux qui l’ont racketté quelques semaines plus tôt, il se prend vite un coup de couteau et finit à l’hôpital car renversé par un chauffard. Il revient avec la version 2.0 de son personnage, qu’il a appelé tout bonnement Kick Ass : maintenant, qu’il a été refait de partout, il a moins de sensations quand on le frappe. Alors, il commence à patrouiller la nuit et cherche Mr Bitey, un chat et tombe littéralement nez-à-nez avec des malfrats qui poursuivent un homme, une aubaine pour lui, il peut enfin défendre cet homme. Son acte est médiatisé car des passants l’ont filmé et ont mis la vidéo sur Youtube. Une véritable réussite pour lui, il peut donc s’en prendre à plus gros : un drogué et ses potes dans un appartement, armé d’un taser, il blesse légèrement le méchant, se croyant foutu, il est sauvé par un duo de super-héros qui sont beaucoup plus professionnels et déterminés que lui : un père et sa fille. De fil en aiguille, il sera propulsé au rang de star nationale grâce à MySpace, ce qui va attirer les foudres du parrain de la ville. Il va donc se retrouver piégé, morflant comme jamais, en étant encore une fois sauvé par la gamine qui est largement plus douée que lui… C’est à partir de là qu’il prend conscience de ce qu’il fait, qu’il est maintenant une personnalité regardée, admirée et que ses faux-pas se révèlent destructeurs pour lui-même. Il prend véritablement conscience de cela lors de la scène où il se retrouve devant le miroir, complètement en sang.


Cette fameuse scène, je la trouve carrément terrible : non seulement le morceau intitulé Marshmallows est vraiment beau, mais en plus, on a successivement la prise de conscience de Kick Ass qui se rend compte que se prendre pour un super-héros n’est pas donné à tout le monde, et surtout, qu’il faut assumer. Cette maturité, Hit Girl l’a déjà acquise : pendant que Dave se rince dans la salle de bain, elle prépare la vengeance de son père, ne pouvant pas encore faire son deuil. Je trouve que Kick-Ass est un film certes, pour un public ciblé (geek/jeune) mais qui véhicule de bons concepts : la responsabilité (mais en mieux formulé que dans Spiderman), l’assomption et l’acquisition de la maturité. Et cette dernière est soit forcée (Hit Girl), soit délibérément choisie (Kick Ass). Effectivement, les deux sont jeunes, Mindy (le vrai prénom de Hit Girl) a 12 ans mais a déjà la tête sur les épaules, les pieds sur terre et une définition bien nette du bien et du mal. Elle n’a plus aucune innocence, malgré son jeune âge, c’est une adulte qui a été formatée par son père. Ce dernier lui vouait un amour inconditionnel, mais il l’a utilisée dans sa revanche contre Frank d’Amico et les criminels en général. Pour ce qui est de Dave, c’est autre chose, il a voulu plonger dans le monde des grands sans vraiment savoir ce qui l’attendait, ne pouvant plus faire marche arrière, il convient d’accepter son sort et d’assumer ses choix. Au-delà du fantasme, Dave a dû reprendre contact avec la réalité, et la scène devant le miroir est le fameux déclic. « Quand on n’a pas de pouvoir, on n’a pas de responsabilité ? » Pas sûr…


Au-delà de la morale et de la volonté de faire passer des messages, on doit quand même retenir que Kick-Ass, c’est du fun à l’état pur : on nous colle des scènes de combat carrément pitoyables (la première de Dave qui se solde par un séjour à l’hôpital) et d’autres incroyables et vraiment appréciables, celle avec Big Daddy (avec en prime, le remix du thème de 28 jours plus tard) ou celle où Hit Girl devient Robin et tente tant bien que mal de sauver Kick Ass et son père d’une mort certaine. Mention spéciale pour cette scène, celle du FPS avec en prime, la musique de Sunshine retravaillée pour l’occasion. C’est acrobatique, y’a des armes, des sauts périlleux, des cascades, youhou ! C’est violent, y’a des effluves de sang, on transperce des gens de part en part, on charcute… Kick-Ass est un film qui montre que les super-héros peuvent tuer et se faire tuer. C’est hyper rythmé, bien sûr, on n’a pas que du combat, et quand ceux-ci cessent, on ne retombe pas dans le plat, puisque l’on suit tour à tour Dave ou Mindy et son père dans leur vie quotidienne mais avec des préoccupations bien différentes.


A la limite de nous virer le héros, Hit Girl est une super gamine, adulée de tous. Mignonnette dans la vie de tous les jours, habillée en rose, avec des couettes et recevant pour son anniversaire des couteaux papillons, elle se transforme en véritable guerrière lorsqu’il le faut et n’hésite pas à démonter du méchant avec une violence extrême, avec une absence hallucinante de remords. On pourrait notamment croire que Mindy n’est qu’un instrument, un robot dont s’est servi son père pour mener à bien sa quête, mais elle nous prouve à de nombreuses reprises qu’elle a un cœur, notamment grâce à son amour pour son père, mais aussi avec sa compassion à la fin envers Dave, même si elle est quasiment imperceptible.
Dave n’en perd pas néanmoins tout son charme, mais la force exemplaire et le courage de la gamine est peut-être trop importante pour être réellement le personnage principal au rang de héros. Big Daddy est lui, un papounet tout mignon, qu’on a du mal à détester malgré ce qu’il a fait de sa fille. Quant aux méchants, c’est des vrais méchants bien dégueulasses, sans foi ni loi.


En plus d’être violent et plein de sens, Kick-Ass arrive à dédramatiser toutes les situations grâce à l’humour (souvent noir) dont il fait preuve. Notamment grâce au personnage principal, Dave que l’on entend en voix-off qui se lance dans des répliques assez drôles « Comme chaque tueur en série le sait, il y a un moment où l’heure n’est plus au fantasme », tombe malgré lui dans des situations comiques (celle où les deux petites frappes se foutent de sa gueule en voyant son costume), sans oublier son entraînement fait par lui-même où il tente de sauter d’immeuble en immeuble, mais se ravise au tout dernier moment… Il arrive également à rendre hommage à des films et autres médias de la pop culture notamment, grâce à des références assez chouettes : musique d’Ennio Morricone, mentions de Scott Pilgrim, Spiderman, Sin City, Lost et surtout, Batman avec le costume très ressemblant de Big Daddy, une réplique assez savoureuse de Hit Girl (le fameux signal dans le ciel de la bite géante donné par le maire) et une discussion entre Dave et l’un de ses amis : Batman ou Le Joker ? Mais attention, Kick-Ass n’est pas seulement qu’un film de geek, c’est plus profond que ça, et je vous l’ai montré plus haut.


Pour la petite comparaison avec le comics, Kick-Ass garde le fil conducteur, mais prend quelques libertés : une histoire d’amour (bah oui, on est au cinéma, fallait bien du cul), et même si le film est assez sombre, le comics l’est encore plus de par son univers, ses couleurs… Car en effet, dans le film, les personnages évoluent dans un monde de couleurs (lycée, magasin de comics, même le chocolat chaud de Mindy et de son père a des marshmallows…) et le ton est davantage comique, même s’il garde sa violence, sa volonté de frapper, de se distinguer par l’abrupt.
Hors comics, pour relever la sauce, on a le droit à une savoureuse bande originale (The Prodigy, The Pretty Reckless…) et des thèmes qui ne sont pas si éloignés des thèmes héroïques que l’on a pu trouver dans la franchise Batman de Christopher Nolan.


Pour finir, Kick-Ass est un film à voir au moins une fois dans sa vie, car il donne une sorte de renouveau au genre, sans pour autant être prétentieux et prendre son public pour des cons. Il arrive à jongler sur plusieurs terrains en même temps, et c’est assez rare et admirable.

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le 9 mai 2015

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Szagad

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