Jeff Wadlow propose un Kick-Ass 2 délirant, de moins bonne facture que le premier épisode, mais qui conserve son intérêt, principalement en tant que divertissement, grâce à son humour et ses scènes de combat jouissives.

La saga Kick-Ass est parvenue à se créer une véritable identité à l’écran grâce à la créativité de Matthew Vaughn qui s’inspire du comic book de John Romita Jr et Mark Millar pour diriger le premier film. Il n’était pas forcément chose aisée de se frayer un chemin parmi la déferlante d’adaptations de comics qui sévit sur nos écrans depuis une dizaine d’années, mais on retrouvait dans Kick-Ass un cocktail détonnant d’humour et d’action. Mais c’est surtout sa sensibilité qui différenciait Kick-Ass, fort de personnages dénués de tout super-pouvoir et donc vulnérables. En cela, le premier opus gardait une certaine crédibilité dramatique et en devenait émouvant.

C’est un humour encore plus délirant que propose Kick-Ass 2, criblé de situations loufoques. Moins subtil, et parfois même lourd, franchissant une ou deux fois la frontière du vulgaire (notamment une scène de vomi bien lourdingue dont on se serait bien passés) bien que la plupart du temps on s’esclaffe avec plaisir de la bêtise des personnages. Parfois au détriment de l’intelligence du film, la cible de prédilection du film semble être résolument adolescente, dont on retrouve les codes intégrés naturellement dans l’intrigue : Facebook, Twitter, YouTube, ou références “pop culture” ado comme Twilight, Channing Tatum ou Union J. L’on retrouver également des références geek marquées, dont un superbe t-shirt “I hate reboots”.

Les héros du “crew” Justice Forever sont en majorité une bande de losers un peu pathétiques ; l’on aura donc peine à s’attacher à la plupart d’entre eux. Seuls, Aaron Taylor-Johnson et Jim Carrey se détachent clairement du lot. L’on regrette que ce dernier, incarnant le Colonel Stars and Stripes, ne soit pas plus exploité au vu du potentiel de ce personnage au passé trop mystérieux. Les autres protagonistes sont souvent ridicules, bien plus que dans le premier film, et parfois même trop, mais la majorité du temps ils nous feront rire, dédramatisant un terrible constat : avec le recul, l’on réalise que tous ces gens sont fous, qu’il s’agisse des héros ou des vilains. En cela, Kick-Ass 2 parvient à nous faire vibrer en traitant d’une bande de losers caricaturaux aux intentions de bravoure inspirantes – de vrais gens qui tentent de rendre le monde meilleur. Quand la frontière de la folie est-elle franchie ? Ici, probablement, d’où l’aspect tragique de ce récit de folie groupée qui peut provoquer de véritables drames. Cette folie sera évoquée par un des rares personnages sains de l’univers de Kick-Ass, le père adoptif de Hit Girl : “Big Daddy t’a volé ton enfance”.

D’ailleurs, The Mother Fucker devient un vrai méchant : c’est sa folie qui finit par effrayer et le rendre réellement dangereux car d’adolescent inoffensif légèrement dérangé, il passe à un vilain fou à lier, animé par son désir de vengeance. L’acteur Christopher Mintz-Plasse est très bon, et par contraste avec cette nouvelle dangerosité, l’humour débile du personnage et sa stupidité invétérée le rendent encore plus drôle… grâce à une forte dose de second degré.

Une fois de plus, le véritable héros de l’univers de Kick-Ass est Hit Girl. D’une classe folle, l’étoile montante Chloë Moretz incarne à 16 ans à peine un personnage féminin qui s’affranchit des conventions. Elle est fabuleuse dans ses scènes de combat et la force d’une telle héroïne entourée de bras cassés ne sera pas sans rappeler une mini-Buffy. Le film lui est pratiquement dédié tant le phénomène Hit Girl est creusé, et l’on regrette qu’une partie de son évolution ici sente le déjà-vu (l’on pensera notamment à Lolita malgré moi) et il est dommage qu’elle soit plus féminisée, voire sexualisée, notamment dans ses motivations, que dans le premier épisode par Matthew Vaughn. Sa relation avec Dave s’étoffe également à mesure que les protagonistes sont développés.

Les costumes sont inégaux, plus ou moins travaillés selon le rôle : le Colonel Stars & Stripes et The Mother Fucker tirent leur épingle du jeu, tandis que d’autres, notamment Hit Girl, semblent avoir écopé de fripes de moins bonne qualité… Ce type de détails est rattrapé par les scènes d’action qui tiennent toutes leurs promesses. Le rythme du film est inégal et semble retomber un peu après la première demi-heure, mais la deuxième moitié de Kick-Ass 2 fait oublier ce moment de vide. “Try to have fun, otherwise what’s the point”, lâche Jim Carrey en une mise en abyme qui représente le leitmotiv de Kick-Ass 2, empreint d’une sorte de violence, parfois perturbante car réelle, mais souvent jouissive comme il pouvait y en avoir dans God Bless America par exemple. Le film continue l’hommage aux comics opéré dans le premier, à l’aide d’effets visuels ou références, et reste dans une dynamique de second degré en tournant en ridicule les codes et noms des super-héros en poussant l’exercice à l’extrême (Insect Man, Toxic Mega Cunts…). La bande originale, enfin, parvient à demeurer intéressante même si elle se situe un cran en-dessous de la précédente.

Kick-Ass 2 en fait parfois trop, mais représente un divertissement fun et agréable, avec de belles promesses pour le troisième épisode que l’on espère voir garder le meilleur des deux précédents.
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le 18 août 2013

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