"WHERE DID YOU COME FROM KILLER JOE ?!" DESOLE....----------> SORTIE
William Friedkin fait partie de ces cinéastes peu connus du grand public parce qu’éclipsés par l’aura d’une ou de plusieurs de leurs œuvres (l’Exorciste dans le cas de Friedkin).
Le bonhomme a enchaîné les films cultes (Police Fédéral Los Angeles, French Connection, Cruising…même son remake décrié du Salaire de la peur vaut paraît-il le coup d’œil) et malgré un passage à vide dans les années 90, est demeuré un cinéaste poil à gratter et provocateur.
Son goût pour les personnages ambigus et la violence s’exprime à nouveau dans Killer Joe, petit film indépendant qui a bénéficié d’une sortie restreinte aux USA, conséquence d’un classement NC-17 annonçant une œuvre sombre, violente et surtout trop politiquement incorrecte pour les distributeurs.
L’action se déroule dans la banlieue White Trash de Dallas que Friedkin filme comme le terreau de la bassesse humaine et de toutes les perversions.
Ainsi, le point de départ assez hallucinant de l’histoire sert de prétexte à une nouvelle plongée dans les tréfonds de l’âme humaine, comme le réalisateur les affectionne.
En effet, à l’exception de la jeune Dottie qui symbolise l’innocence, tous les personnages sont corrompus et suintent la cupidité, la lâcheté, la violence ou la bêtise crasse.
Ce portrait au vitriol de l’Amérique n’est pas sans rappelé certaines œuvres des frères Cohen et notamment Fargo, d’autant que Friedkin partage avec les frangins une appétence pour l’humour noir même si son cinéma à lui est beaucoup plus malsain, violent et sexuel (ah ce plan surréaliste sur les poils pubiens de Gina Gherson !).
En homme de théâtre qu’il est, « Wild Bill » privilégie une mise en scène à huit clos et très proche des protagonistes donnant ainsi l’occasion à son casting quatre étoiles de s’exprimer pleinement.
Emile Hirsch retranscrit à merveille l’ambivalence morale et les contradictions de son personnage, Juno Temple est troublante dans son rôle de petite fille dans un corps de femme, Thomas Hayden Church est hilarant en paternel complètement abruti et la toujours sexy Gina Gherson brille en cougar redneck vulgaire au possible.
Toutefois, Matthew McConaughey les éclipse tous et livre la performance de sa carrière.
Son interprétation hallucinante du chasseur de dragons ultra-badass Denton Van Zant dans le Règne du feu et sa participation à des films comme Amistad ou le récent Mud étaient déjà bien loin de son image de bellâtre habitué aux comédies romantiques.
Ici, le comédien Texan se transcende : menaçant à la seconde où il apparaît dans le cadre, classe et éminemment pervers, Killer Joe Cooper entre tranquillement au panthéon des figures du mal les plus charismatiques !
Il fait presque passer l’Anton Chigurh de No Country For Old Men pour un rigolo lors d’un climax final qui consiste en une explosion de violence débridée (voir grand guignol) orchestrée par un Friedkin magistral dans sa gestion de la tension.
Au final, Killer Joe détonne dans le paysage cinématographique américain et montre que ce vieux Bill n’a rien perdu de sa férocité et de sa folie comme en témoigne son final furibard.
Dérangeant, sexy, trash, drôle…autant de qualificatifs qui viennent à la bouche pour évoquer cette petite bombe déconseillée aux âmes sensibles et aux culs bénis mais chaudement recommandée aux amateurs de péloches barrées !
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