L'ayant vu il y a très longtemps dans sa version cinéma et n'en n'ayant plus de souvenirs, je me suis lancé dans le visionnage de la version-longue, redoutant un peu ces trois heures étant donné le ton du sujet.
Force est de constater pourtant que Ridley Scott est parvenu à gérer son rythme et sa narration, la version-longue se laisse suivre sans aucun problème. Alliant récit épique et histoire de guerres religieuses, les fameuses croisades, Kingdom of Heaven illustre et romance une partie de l'histoire des croisades et plus précisément la prise de Jérusalem par Saladin après les exactions de Renaud de Châtillon.
Le scénario utilise bien sûr des raccourcis afin de rendre moins complexe et plus accessible cette histoire auprès du public, cependant si raccourcis il y a ils ne sont pas une contrainte et une mauvaise représentation de l'histoire. Bien que l'on aille pas au cinéma prendre un cours d'histoire, le scénario de Kingdom of Heaven ne s'avère pas si inexacte que cela. Il s'évertue surtout à cibler l'essence d'un épisode historique pour former un arc narratif autour de diverses thématiques.
Ainsi Kingdom of Heaven se révèle finalement être une grande fresque épique qui nous parle avant tout de tolérance au-delà des confrontations religieuses. Montrant Jérusalem comme une ville cosmopolite et dépeignant finalement le sultan Saladin comme un dirigeant droit et juste. Encore une fois pas si éloigné de la réalité historique, la question n'est pas de savoir si le film dit vrai après tout, mais plutôt de le prendre comme une proposition du réalisateur tentant de sensibiliser le public sur les désastres causés par les guerres tenues au nom d'un dieu. L'avènement de la troisième croisade s'avère être une époque idéale pour exprimer tous ces messages-là, d'autant plus avec les interventions de personnages historiques forts tels que Saladin donc, mais aussi Sybille de Jérusalem, Guy de Lusignan et bien entendu le roi lépreux Baudouin IV.
Au coeur de cette grande histoire se tient aussi celle de Balian d'Ibelin, un Croisé ayant réellement existé mais dont l'histoire pour les besoins du film a été grandement romancée, encore une fois sans que cela n'ait une réelle incidence, l'important étant d'amener le spectateur à se poser des questions et assimiler certains messages au travers de ce personnage. Ainsi Orlando Bloom s'écarte donc ce ses rôles de héros de films grands publics pour composer ici un personnage complexe et profond, simple forgeron sous le joue de son seigneur, qui se retrouvera enrôlé parmi les Croisés et deviendra finalement l'un des défenseur de Jérusalem lors du siège tenu par Saladin. La petite histoire à travers la grande histoire donc. Autour de l'évocation de Balian se tiennent les intrigues des autres personnages, exploitées efficacement et sans laisser de côté la psychologie des personnages. A noter d'ailleurs que Jeremy Irons en Tibérias et Eva Green en Sybille s'avèrent excellents, bouleversante même pour la belle Eva.
Ridley Scott fait le choix de s'écarter de toute forme de manichéisme, hormis deux antagonistes principaux, les personnages agissent selon des convictions pouvant être comprises par tout le monde. La volonté ici n'est donc pas de montrer qui avait raison et qui avait tort, mais plutôt de dépeindre une époque et plus précisément la Terre Sainte lors des Croisades. Ce que le film fait parfaitement grâce à une reconstitution minutieuse. Les décors sont d'ailleurs superbes au même titre que les costumes. Balayant l'idée que le Moyen-Âge n'était régit que par l'obscurantisme religieux et nous rappelant que l'époque a aussi eu ses bons moments. Le raffinement présenté dans le film par la cour du roi Baudouin IV à Jérusalem témoigne aussi de cet fascination qu'exerçait l'orient sur l'occident.
Quant au film en lui-même, la réalisation s'avère très bonne et certaines séquences sont le fruit d'une maîtrise absolue, notamment le siège de Jérusalem qui demeure être le point culminant du film en terme de grandiose et de déploiement technique. Harry Gregson-Williams quant à lui compose une bande-originale offrant de belles envolées lyriques.
Kingdom of Heaven est donc une grande fresque somptueuse portée par un inébranlable message de paix et de tolérance, message mit en scène par un réalisateur qui met tout son coeur à l'ouvrage.