Ne fais pas le con, Terrence, pose cette caméra !

Terrence, je ne te reconnais plus. Je crois bien que tu vieillis mal et que tu te barres en cacahuète. Rappelle-toi quand tu filmais des platanes et des (h)êtres, c’était sacrément joli ! Ta narration était lisible aussi. Je dois dire que ça me manque un peu, Terry…


Terrence Malick is back ! Si l’annonce peut faire peur à certains, j’étais sacrément impatient de voir ce Knight of Cups vu sa BA électrisante. S’il fut un temps où voir un Malick au cinéma était un événement, aujourd’hui c’est devenu une routine. Papi fait tout à l’envers, entre 1973 et 2011, il nous a sorti en moyenne un film tous les 7 ans. Depuis « Tree of Life », c’est 3 en 4 ans. Tu sens la fin arriver, c’est ça ? Désolé Terry, mais tu n’as plus ta force d’antan…


Malick n’a jamais fait dans le scénario compliqué. Ils tiennent généralement sur un timbre-poste, vraiment. Mais ça ne l’a jamais empêché de sortir de sacrés chef d’œuvre, La Balade Sauvage en tête pour ma part. Sauf que cette fois-ci, il n’y a pas d’histoire mais un thème. On observe un Christian Bale errant qui campe un mec complètement pommé, un artiste-auteur qui s’est retrouvé à Hollywood, sans doute pour son talent, mais qui s’est peu à peu fait bouffé par ce système où les apéros-dînatoires partent en sucette et veste en cuir passé le 3ème mojito. Rick (Christian Bale donc), c’est tellement le bordel dans sa tête qu’il faut qu’il passe sur tous les fessiers de Santa Monica. On aura vu mieux comme cure. Malick empile tellement les avions de chasse que le Charles-de-Gaulle ne pourrait même pas en embarquer la moitié. Papi Terry a 71 piges et fait sa crise de la quarantaine un peu plus tard que prévu. C’est ça d’avoir voulu vivre en ermite les 30 premières années de sa vie, mon coquin.


Plus sérieusement, Papi n’aime pas vraiment Hollywood, ce n’est pas un secret. Mais il aurait pu le dévoiler ici avec plus de subtilité. Parce que mettre notre Rick hagard sous prozac-drogue-martini face à deux pingouins lui déblatérant leur charabia financier, ce n’est pas nouveau et c’est même lourd. Et on continue à appuyer un peu la critique subtile, Rick est en voiture, il bave devant les gratte-ciels. Gros plan sur un panneau publicitaire, puis un autre, puis encore un autre au cas où l’on n’ait pas capté, etc… ZZZzzzZZZ… Oh tiens ! Une mendiante avec un verre MacDonald pour récupérer les piécettes, je vais zoomer dessus, prends garde vilain système, mouhaha ! Enfin je ne veux pas dire mais Malick se définit comme un philosophe quand même. Pourquoi s’abaisser à ça ? Soit dit en passant, Terrence a toujours choisi des acteurs bankables pour ses films indé. Simple pied-de-nez à Hollywood ?


Contente-toi de faire ton film sur un mec pommé, c’est un super thème ça ! Je n’ai pas été réceptif à son angle d’attaque, mais le thème m’intéresse beaucoup. Il m’aura juste manqué une histoire. Jean Gabin a le défaut d’être mort, mais j’aime à rappeler qu’il disait « Pour faire un bon film, il faut trois choses : une bonne histoire, une bonne histoire et une bonne histoire ». Pas forcément d’une histoire alambiquée, mais d’une bonne histoire. Pas juste d’un thème. J’ai beaucoup de mal avec le cinéma expérimental, même s’il peut en ressortir de bonnes réflexions ou de jolies prouesses visuelles. KoC ce n’est pas expérimental, mais ça en prend la route. Et ça ne m’intéresse pas. Tenez par exemple, il est facile de voir un parallèle (un hommage ?) à Jonas Mekas et son As I was moving ahead occasionnaly (reprend sa respiration) I Saw Brief Glimpses of Beauty : les enfants qui jouent avec la balançoire, des images d’archive personnelles au grain VHS, la voix off omniprésente. Encore heureux que le film de Malick ne dure pas 5 heures, lui. Sans spoiler (lol), on comprend donc très vite où Papi veut en venir dans son « histoire ».


Enfin, comment ne pas parler de ce film sans aborder la façon de filmer. J’en reviens au titre : POSE CETTE CAMÉRA ! Bon, je vois bien pourquoi il fait danser sa caméra durant 2 heures autour de ses personnages, histoire d’appuyer l’idée d’un être perdu toujours en mouvement, s’il s’arrête de marcher il meurt… Hein ? Non ! J’en avais juste mal à la tête franchement. J’imagine bien Malick prendre sa steady cam et suivre Bale dans les montagnes, dans le désert, au musée puis le filmer de dos, des orteils aux oreilles, faire des 3-6 flips « Oh ouais c’est beau, profond tout ça, yeaaaah ! Envoie tout Christian et garde bien la bouche ouverte surtout, t’es le meilleur ! ». Et puis ce montage bordélique, sur découpé… La forme au service du fond, sans doute.


Grosse déception au final. Je m’attendais à plus de structure, plus de cohérence et une narration plus lisible. Oui, je suis encore ce tout petit qui a besoin qu’on le tienne parfois par la main :/
Néanmoins il y a des moments et plans sublimes dans ce film. Quand Rick est avec ses nanas, c’est bien foutu (les scènes hein), l’insouciance est magnifique. La sauterie dans la villa de Banderas au tout début m’a plu aussi, dans sa façon de filmer le bordel généralisé et la descente aux enfers. Je pensais que cette scène serait un déclencheur dans le film alors qu’elle n’est qu’anodine. Mais tout ça ne pèse pas très lourd dans l’ensemble du film.
T’as déconné Terrence.

WelshOrson
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le 27 nov. 2015

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Loïc A.

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