Le film est forcément, pour tous ceux qui s'intéressent à la justice, profondément bouleversant. Retraçant la célèbre traque du violeur et tueur Guy Georges, il évite de tomber dans un portrait manichéen et un thriller où l'horreur est le seul ressort de l'histoire. C'est tout à son honneur.


Ce qui ressort du film, en réalité, c'est la tragédie d'une telle affaire, l'humanité dissimulée derrière le monstre. La scène finale, ainsi, celle des aveux de Guy Georges - joué par Adama Niane, excellent -qui a nié des mois tous ses meurtres est bouleversante. On voit le tueur en larmes, qui semble lui même expier sa faute, et donner la possibilité aux familles de faire enfin le deuil.


L'enjeu du film n'est donc pas le sordide mais la justice, tout simplement, des victimes et un accusé, des hommes et des femmes, au coeur du drame. Il n'est jamais mauvais de le rappeler, alors que beaucoup de criminels sont vus comme de simples fous et sont l'objet de la vindicte populaire. La vérité est infiniment plus complexe et derrière le monstre, il y a toujours l'homme.


Porté par un casting très bons que ce soit Raphael Personnaz, Nathalie Baye, ou encore Vuillermoz et Gourmet en enquêteurs, le film se divise en deux parties : une partie portant sur le procès lui-même en 2001 et une partie sur l'enquête, qui débute en 1991. Entre les deux, des rapprochements, des ponts. Une boucle bouclée en somme. On voit les errances de la police, les fausses pistes, les atermoiements. Le réalisme est de mise, sur un sujet pareil, tout comme la sobriété et le film parvient non seulement à montrer l'envers du décor policier - "dans l'ombre et sans gloire" comme le dit l'enquêteur Magne - mais aussi celui de la justice, où l'on saisit mieux notamment le rôle d'un avocat.


Le film est un peu froid, un peu confus, à l'image de la réalité d'une enquête criminelle comme celle-ci mais ce moment du procès final, comme le point d'acmé de l'affaire et du film, théâtre tragique, ce qui relie la justice et le cinéma, est un moment d'une troublante vérité. Le monstre redevient homme, les victimes obtiennent enfin réparation. Les avocats de l'assassin jouent le rôle noble des confesseurs, pour non pas sauver leur client mais la vérité. Les pleurs de soulagement de Guy Georges résonnent au gré de ses aveux. C'est un homme qui jusqu'à là fuyait ses responsabilités. C'était encore l'enfant qui vengeait l'abandon de sa mère et qui le faisait payer aux femmes qu'il croisait. C'est la fin de la tragédie.


Sur un sujet si sensible, où les protagonistes sont vrais, les détails réalistes et les faits exacts, il est facile de se casser les dents. Mais le film parvient à éviter l'écueil sans verser non plus dans le mélodrame. L'alternance de scènes à différentes époques confère au film une dimension tragique et sobre. Intéressant, troublant, terrible, L'Affaire SK1 est un film avant tout sur la justice et ses conséquences, où les destins entrecroisés de ceux qui la font s'entrecroisent sous les hospices du drame.

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le 23 mai 2015

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Tom_Ab

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