Ozon lorgne vers le fantastique et l'horreur avec brio, il use des codes du genre avec virtuosité, multipliant les fausses pistes comme il se doit. Les critiques ébahis n’hésitent même pas à citer les maîtres du genre, De Palma et Polanski, même Hitchcock, tout bon sens mis à part. Ozon ne pouvait rêver meilleure publicité. Au delà d’une réputation sulfureuse, le film contient en effet son lot de sexe, son actrice principale passant la moitié du film à poil. Pas de quoi pour autant émoustiller un festivalier, le sujet du film est plus complexe au risque de perdre le spectateur en cours de route. Sans tous les artifices déjà bien connus pour les fans d’un genre rarement maitrisé en France, Ozon use et abuse des ficelles pourtant bien usées : cauchemar à répétition jusqu’à l'overdose, ambiguité des personnages, jeu de miroir ; le film se veut plus malin que le spectateur qui finit pourtant par deviner assez rapidement ou se cache la vérité, voire à s’en ficher complètement. Sans la musique, dramatique et oppressante, sans le trouble gémellique de tous les instants qu’il exploite certes brillamment mais pour livrer, au final, un twist tellement attendu et ridicule que l’on ne peut que se dire : tout ça pour ça ! Un réalisateur partage ce point commun avec un écrivain, il peut tout se permettre, il peut prendre la direction qu’il veut, il est le magicien aux mains libres mais cumuler les incohérences et les fausses pistes pour délibérément manipuler le spectateur qui en a vu d’autres (des films qui convoquent psychologie, maladie rare et trouble de la personnalité, etc…), c’est prendre le risque de se prendre les pieds dans le tapis rouge de la croisette et d’ailleurs, le film est reparti bredouille, personne n’est dupe !

Yeahmister
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le 12 mai 2018

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