"Cette histoire de l'Homme et de sa Femme est de nulle part et de partout"

Il faut l’avouer, c’est avec une certaine appréhension que j’ai lancé le film. Difficile, en effet, de ne pas trembler lorsque l’on s’attaque à un tel jalon du cinéma, à une œuvre acclamée par le public et la critique… Et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’aurore a tenu ses promesses.

J’avais peur de voir un film hermétique, car muet et ancien. J’ai vu un film envoûtant, porté par un duo d’acteurs tout simplement sublime. On est bien forcé d’admettre que, parfois, les mots sont superflus, qu’un flot d’émotions contradictoires peut être transmis par le regard halluciné d’un homme prêt à commettre l’irréparable, ou par le regard éperdu d’une femme qui parvient à pardonner l’impensable.

J’avais peur de voir un film complexe, voire ésotérique (les préjugés, que voulez-vous…). J’ai vu un film d’une simplicité émouvante, un film sur l’amour, dans tout ce qu’il a d’universel et d’essentiel. Rien n’est idéalisé par Murnau : Georges O’Brien joue un homme fatigué de sa vie banale, un homme qui cède à la passion et qui délaisse celle qu’il aime. Osons le mot : cet homme est faible, comme chacun de nous peut quelquefois l’être. Mais qu’importe, si cet homme est prêt à tout pour racheter son crime. Alors oui, couvrir sa femme de présents pour lui faire oublier qu’on a essayé de la noyer, c’est maladroit. C’est même naïf, et c’est précisément en cela que la tentative est profondément touchante.

Et puis… Il y a Janet Gaynor ! Une heure durant, l’actrice devient l’incarnation même de la candeur, de l’abnégation, de l’immense pitié réduite à l’échelle humaine. Je ne peux concevoir qu’on puisse rester de marbre face au visage, au sourire, au regard angéliques de la jeune femme, qui nous émeut elle aussi par sa naïveté enfantine.

Alors, que retenir ? L’espoir, semble nous dire Murnau. Seul l’espoir d’être pardonné par l’être cher, l’espoir que l’amour subsiste malgré les drames de nos vies, permet au jour de finalement se lever, et à l’aurore de briller de son éclat grandiose.
WinslowLeach
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le 29 nov. 2014

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