L'Enclos
7.1
L'Enclos

Film de Armand Gatti (1960)

Je suis très fier d'écrire ma 200 ème critique sur un film d'Armand Gatti, poète, réalisateur de films et metteur en scène de théâtre. J'ai joué la pièce qu'il a écrite en 1977 "Le cheval qui se suicide par le feu " et je fais actuellement un travail de recherche sur sa vie.
Ses pièces utilisent un langage bien plus complexes que celui du film visionné, mais on voit déjà toute la patte Gatti. Il y a cette volonté chez Gatti de retranscrire des faits d'histoire et des anecdotes qui ne sont pas présents dans les livres d'histoire. En parlant du quotidien des camps, il rend son propos plus large qu'une simple reconstitution de l'histoire de la seconde guerre mondiale.
Ce film est l'un des premiers à témoigner de l'horreur de la 2 nde Guerre mondiale après "Nuit et Brouillard " d'Alain Renais.


Chez Gatti, le passé est retransmis pour questionner le présent. On parle beaucoup de la morphine dans le film qui est utilisé pour abrutir les prisonniers des camps. Cette technique de l'abrutissement par la morphine existe toujours dans les prisons actuelles.
Ici le film est une trace du passé : une mémoire pour montrer comment ca se passait dans les camps.
Gatti a été emprisonné en camps de travail durant sa jeunesse pendant la guerre, il témoigne donc avec une certaine justesse les relations entre les kapos et les prisonniers.
Les dialogues quotidients entre les prisonniers sont intéressants, on voit une véritable organisation qui se met en place avec les kapos tout en haut, les médecins puis les responsables des clés et même une hiérarchie entre prisonniers.
Toute la partie psychologique est finement traitée en plus de l'emprisonnement et des morts par chambre à gaz : il y a une véritable envie d'humilier chez les kapos nazis, ils demandent aux prisonniers de s'entretuer entre eux et le discours de la pureté du sang est présent.
Cette création de l'Enclos montre une volonté qui va au delà de la mort et de l'exécution : il y a une idée de mettre cela en spectacle et de faire durer la souffrance.
Le but étant de diviser les prisonniers entre eux, de les faire craindre entre eux et de les mettre dans une instabilité permanente.


La fin est cruelle mais elle est un point d'orgueil au total : même quand le héros se croit libre il est ensuite envoyé en chambre de gaz. La promesse qu'on lui a faite n'a bien-sur pas été tenu et le dernier plan avec les larmes aux yeux est magnifique.


Malgré cela, il reste une certaine solidarité entre les prisonniers qui tentent de s'entraider.
Une discussion entre prisonniers était intéressante : ils parlaient des différents kapos. Parmi les kapos, il y a ceux qui exécutaient les ordres et ceux qui allaient au delà et qui en profitaient pour tuer impunément. Même entre certains kapos et prisonniers, il y avait une relation humaine : des kapos étaient détestées et certains étaient "aimés" par les prisonniers.
Chez Gatti, le mot " lutte " est central dans son œuvre. Un personnage dit d'ailleurs dans le film " Tu mourras peut être mais la lutte continuera ". Il y a cette idée que la lutte des idées restent plus important que l'homme lui-même, les idées restent lorsqu'elles sont transmises de génération en génération a contraire des hommes.
Bref, un film central sur la seconde guerre mondiale qui traite son sujet avec un certain sérieux et qui nous plonge dans le quotidien et l'organisation des camps.

PierreDescamps
8
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le 7 févr. 2016

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