L'Enfance d'Ivan est le premier film du réalisateur russe, Andrei Tarkovski inspiré de la nouvelle, Ivan de Vladimir Bogomolov.


Le film a dû se battre pour ne être qu'une œuvre de propagande étant donné qu'à l'époque, Nikita Khrouchtchev, le chef de l'URSS qui même s'il a posé des bases pour Gorbatchev en déstalinisant la Russie, a provoqué en partie la période la plus tendue de la Guerre Froide avec la crise des missiles de Cuba.


Tarkovski a même dû faire ce film avec la moitié du budget de départ après que les studios Mosfilms qui produisent le film, virèrent le réalisateur originel pour recruter Tarkovski ...


De plus, le spectre de la Seconde Guerre mondiale plane encore sur ce film, en sachant que la Russie a connu des pertes de 26 millions sur les 50 millions de victimes de cette guerre ! 1


L'Enfance d'Ivan est un film qui traite comme son nom l'indique, de l'enfance d'Ivan Bondarev, un orphelin de 12 ans après l'assassinat de sa mère par les nazis, qui est devenu entre temps éclaireur dans l'armée soviétique afin de se venger.


Ce qui frappe directement aux yeux, est la dissonance entre la nature qui est montré en tout premier, qui est de nature généreuse et accueillante alors que très vite, ce qui frappera est le manque de générosité et de bienveillance que démontre l'homme envers d'autres hommes ...


Ce film parle des enfants-soldats via le regard d'Ivan, qui est condescendant envers les adultes se prenant pour une machine à tuer afin d'avoir sa vengeance avec l'installation des thèmes chers à Tarkovski comme : la recherche du huit clos, l'onirisme des images, le rapport à l'univers, l'opposition entre l'idéal de l'enfance perdue et un univers froid et déshumanisé ici symbolisé par la guerre.


L'une des scènes les plus marquantes, est très certainement le passage où Ivan se retrouve seul dans la bâtisse qui leur sert d'abri et qu'il s'amuse ... mais à quoi s'amuse-t-il ?


Membre de l'équipage de l'Arcadia : à jouer à la console ?


Albator Larson : on est en 1945 et la première console de jeux vidéo date de 1972 (la Magnavox Odyssey).


Membre de l'équipage de l'Arcadia : On sait jamais, on anime bien des critiques sur un site terrien, alors que l'on est dans l'espace ...


Albator Larson : C'est pas faux ...


Eh bien, il se préparait à tuer l'ennemi ... le tout est uniquement éclairé par la lampe de poche d'Ivan pour renforcer la noirceur de la scène, qui est déjà filmé caméra à l'épaule de manière tremblante.


Le film eu le droit à de nombreuses réactions notamment en occident avec Jean-Paul Sartre qui disait ceci sur le film : « En un certain sens, je pense que l'auteur […] a voulu parler de lui et de sa génération. […] Je voudrais presque dire : voici les Quatre Cents Coups soviétiques, mais pour mieux souligner les différences. Un enfant mis en pièces par ses parents : voici la tragi-comédie bourgeoise. Des milliers d'enfants détruits, vivants, par la guerre, voilà une des tragédies soviétiques. »


Ce à quoi Tarkovski à répondu plus tard :


« Certes, ce film a été bien reçu, mais il a été incompris de la critique. […] Il s'agissait plutôt de la première œuvre d'un jeune metteur en scène, donc une œuvre poétique à comprendre de mon point de vue, non du point de vue historique. Sartre, par exemple, a défendu ardemment le film […], mais d'un point de vue strictement philosophique. Pour moi, ce n'était pas une défense valable. Je recherchais une défense artistique, et non idéologique. […] Ce n'est pas l'interprétation de Sartre que je conteste. Je suis tout à fait d'accord avec cette vision : la guerre produit des héros-victimes. Il n'y a pas de vainqueur dans une guerre. […] Ce que je conteste plutôt c'est le cadre de cette polémique : des idées, des valeurs étaient mises en avant, l'art et l'artiste oubliés. »


En effet, Jean Douchet, critique et historien du cinéma, a dans son stage dédié à Tarkovski fait remarquer et invite le spectateur à voir le film sous son angle originel, car là où le film devrait être sur l'enfance vaillante comme la plupart des films montrant des enfants en Russie, la mise en scène et le développement de l'histoire met davantage en lumière des symboles, la nature et l'enfance comme incarnation de l'innocence par rapport au monde en ouverture à l'univers.


Car Tarkovski malgré qu'il y ait des symboles religieux dans ces films, il n'impose pas sa foi en mettant davantage en lumière les forces de l'univers que la religion, car autant, on peut renier ou pas l'existence de Dieu, on ne peut renier notre appartenance à l'univers (un est tout, et tout est un).


Niveau réalisation, Tarkovski utilise des story-boards, mais il n'est pas aussi mathématique que Kubrick (même s'il y a des parallèles entre leurs films) en laissant son ressenti influer sur la construction de ses plans pour insuffler un mysticisme à ses films.


Il joue aussi des codes du cinéma comme la contre-plongée, que Tarkovski n'utilise pas préférant installer au ciel sa caméra pour mieux enraciner son cinéma dans la terre russe.


Nous avons aussi un rapport assez fort à la lumière, en effet, L'enfance d'Ivan est éclairé fortement comme un film expressionniste Allemand.


Ensuite, au niveau des acteurs, on peut remarquer la performance à couper le souffle de Nikolai Bourliaiev qui capture à merveille cet enfant dont l'envie de vengeance l'aveugle totalement, et qui passe entre plusieurs stades durant le film en étant toujours juste !


On peut également remarquer une utilisation particulière de la musique, en effet, les musiques de ce film ne sont utilisés que lors des séquences de rêves ou de moment de bonheur renforçant la nostalgie d'Ivan pour cette époque où il a été heureux, et non pas obnubilé par sa vengeance !


Pour conclure, L'Enfance d'Ivan est un film sur une victime qui veut passer bourreau alors que la nature lui indique la marche à suivre ...

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le 1 juil. 2019

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Albator_Larson

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