Le grand public ne connaît peut-être pas le nom de Gérard Krawczyk, mais il a certainement vu un de ses films réalisés entre 1997 et 2007. Même plus d'une fois, car nous parlons du réalisateur de Taxi 2, 3 et 4 (2000-2007), de Wasabi (2001) ou des remakes de Fanfan la tulipe et L'auberge rouge (2003 et 2007). Avant d'être un des plus célèbres artisans de Tonton Besson, Krawczyk s'était fait remarqué avec ses deux premiers longs-métrages : Je hais les acteurs (1986) et L'été en pente douce.
Autant dire que lorsque l'on voit ne serait-ce que le second, on se demande ce qui a pu arriver au réalisateur d'Héroïnes pour enquiller autant de mauvais films à la suite, tant le niveau de qualité n'a rien à voir. L'été en pente douce sort dans la mouvance de 37°2 le matin (Jean-Jacques Beineix, 1986), autre film où la chaleur se fait sentir à travers les images et pas seulement à cause de ses scènes de sexe. Mais comme dans le film de Beineix, ce sont avant tout des scènes d'amour que l'on voit dans le film, renforçant l'attachement pour un trio improbable formé par les regrettés Pauline Lafont, Jean-Pierre Bacri et Jacques Villeret.
Deux frères, un balafré, l'autre handicapé mental, pour une seule femme qui les aime à sa manière. Tout pourrait aller pour le mieux s'ils n'étaient pas les intrus du coin. Une maison familiale reprise suite à la mort de la mère et c'est tout un village qui tombe dans ses bas instincts, voyant des moyens divers de les humilier jusqu'au mariage même de Bacri et Lafont. Krawczyk et son scénariste-acteur Jean-Paul Lilienfeld orchestrent un sabotage fiévreux à en faire tourner la tête.
Le final explosif apparaît comme une catharsis, permettant aux héros de se libérer d'un poids de plus en plus lourd. Et ce malgré une perte évidente de rêves partis en fumée. L'attachement pour les personnages face à une adversité aussi jalouse que stupide est présente tout le long du film, aidé par un casting optimal. Lafont est aussi belle à l'écran que terriblement sympathique en fan de Marilyn. Villeret reprend un rôle à peu près similaire à celui qu'il tenait dans Malevil (Christian de Chalonge, 1981) , tout en étant plus touchant.
Quant à Bacri, il étonne par une prestation fragile, moins bougonne et finalement incroyablement humaine. Un homme qui aspire à de grandes choses, mais se voit freiné par bien d'autres (les bâtons dans les roues, le manque d'inspiration, l'alcoolisme). Coluche devait initialement incarner son personnage, mais il est décédé plusieurs mois avant le tournage. On peut se dire avec le recul que le rôle aurait peut-être été trop proche de celui qu'il tenait dans Tchao pantin (Claude Berri, 1983). Face à eux, un Guy Marchand plus salaud que jamais et Jean Bouise impeccable.
L'été en pente douce n'a pas eu le même succès que 37°2 le matin (785 791 entrées contre 3,6 millions), mais il s'avère tout aussi mémorable. Il confirme également que même les réalisateurs de films peu recommandables ont été ou sont encore capables du meilleur lorsqu'ils ont l'inspiration. A l'image de Paul WS Anderson, capable de faire la plupart des Resident Evil (de 2002 à 2016) et Event Horizon (1997).