Au vu du récent succès de La forme de l'eau de Guillermo del Toro (enfin, je dis récent, mais j'ai 3 mois de retard...) je me voyais obligé de visionner ce film qui fut une source. En effet, le métrage aux nombreux succès s'est beaucoup inspiré de L'étrange créature du lac noir, notamment pour l'aspect physique du monstre (mais aussi pour d'autres choses, mais on va pas en parler, pour éviter le hors-sujet). Le film de 1954 a au fil du temps acquis un statut culte, chef de fil d'un genre bien précis : le film de monstre.


Il faut dire aussi que le contexte lui était favorable. Nous sommes dans les années 1950, en plein dans les Universal Monsters Movies (même si la tendance touchait à sa fin), divers films d'horreurs avec tout un lot de bébêtes et monstres tordus dont les plus éminents représentants sont Le Fantôme de l'Opéra ou Frankenstein... À la réalisation, Jack Arnold, un habitué du genre puisqu'il a signé Le météore de la nuit qui connut un vif succès, et qui signera d'autres grand nom du film de monstre tel que Tarantula ! ou L'Homme qui rétrécit.


À première vue, L'Étrange créature du lac noir apparaît comme un film basique du genre, voire même quelque chose d'assez cliché tellement que le spectateur du XXIe siècle a acquis dans son inconscient les bases. Le scénario est en apparence assez simple : une troupe de scientifique débarque dans l'Amazonie sauvage pour faire des recherches sur une créature inouïe, créature qui ne s'empêche pas de se montrer dangereuse à buter tout le monde, l'équipage se retrouve confrontés entre fuir et chasser la bête...
Avec cette base, il devient plutôt facile de délivrer quelques prédictions sur les péripéties à venir, notamment sur le bodycount


On se doute que Zee (Bernie Gozier) et Chico (Henry A. Escalante) vont pas faire long feu étant donné leur non-personnalité. De même que Mark (Richard Denning), en temps que gros connard, va mal finir. Enfin, la bête finira -comme la tradition le veut- en temps que cadavre.
À l'inverse, il était prévisible à des kilomètres que Kay (Julie Adams) et son amant David (Richard Carlson) fassent partie des quelques survivants.


Cependant, l'histoire qui se veut au premier abord comme classique, cache une petite complexité. Généralement, dans ce genre de film, on a deux camps : la bête, et les humains. Mais il arrive qu'entre survivants, des divergences se créent, donnant naissance à des sous-groupes, ce qui est le cas ici. Entre ceux qui veulent laisser le monstre en paix, et ceux qui veulent le capturer -et s'il le faut le tuer- des tensions se forment. On assiste alors à un schéma (Observation vs Capture)vs Monstre, poussant une complexité dans les différentes relations, qui parfois tiendront à leurs partenaires, parfois les mettront à distance.


Petit point faible de l'histoire est celui de Kay, qu'on appellera "la fille", parce que c'est son rôle. L'époque étant ce qu'elle est, le film est pourvu d'un sexisme ordinaire. La fille est la seule fille, qui sert juste à se faire pécho par le monstre. La fille doit rester à l'arrière du danger. Et surtout, quand elle voit le monstre, la fille crie, et ça revient tellement souvent que ça en devient un gros gimmick, et c'est quelque peu énervant...


À toutes ces histoires de scénario s'ajoute une photographie de grande qualité. Les décors sont crédibles, dès que l'on sait que pour l'époque c'est systématiquement tourné en studio. De même que la plastique du monstre est poussée, d'une apparence humaines, mais recouvert de grosses écailles, semblable à du corail... (à noter que le monstre est interprété par Ben Chapman sur terre et Ricou Browning lorsqu'il est dans l'eau). De plus, les vues sous-marines sont très impressionnantes, et implique une immersion réussie, grâce aux diverses algues en avant-plan. À noter que le film était prévu pour être diffusé en 3D, malheureusement je n'ai pas pu le visionner de cette façon (il paraît que c'est pas mal du tout, mais je n'en sais pas grand chose).


Digne héritier d'un genre prospère, La créature du lac noir est devenu au fil du temps une des figures de proue du film de monstre. Mais n'oublions pas des années 1950, et avec lui il a emporté quelques clichés d'une époque révolue, qui feront tilter un œil contemporain.

poulemouillée
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le 8 mai 2018

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poulemouillée

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