L'étrange sensation du fauteuil rouge
Bon, autant d'habitude j'essaie de rester objectif devant un film (de tendre vers l'objectivité en tout cas), autant là, cette critique sera totalement subjective. Parce que le film est une expérience à part, que chacun vivra selon sa sensibilité, parce que c'est un véritable alien au milieu d'une production cinématographique souvent trop formaté, et aussi un peu parce que honnêtement, je ne sais pas trop quoi dire sur ce film. Je ne sais même pas si j'ai aimé ou pas, vraiment. D'où la note moyenne, bien mas pas top comme dirait l'autre.
L'étrange couleur... est un film qui lorgne clairement du côté du giallo, film d'horreur italien qui a connu ses lettres de noblesse grâce à des cinéastes comme Dario Argento ou Mario Bava, pour ne citer que les plus connus. Il leur emprunte une esthétique baroque, une photographie lumineuse et des décors à la fois chargés et très picturaux. Un certain goût pour l'hémoglobine, aussi. Mais le film tire aussi ses références chez les grands noms du cinéma américain "expérimental", Lynch et De Palma (à ses débuts) en tête. L'histoire n'est qu'un fil d'Ariane dans un labyrinthe de séquences plus ou moins angoissantes, qui se mêlent et s'entremêlent dans un kaléidoscope d'images ultra stylisé.
Que ce soit dans le montage ou dans la réalisation, L'étrange... est un film extrêmes. Le ton est donné dès le générique, et se poursuivra ainsi sur près de deux heures. C'est parfois envoûtant, parfois rebutant, toujours trop chargé, à la limite de la rupture. Les cadrages sont extrêmes, les effets sonores sont extrêmes, les angles de vue sont extrêmes, tout dans ce film est jusqu'au-boutiste. Parfois, bien sûr, ça fait trop, et quelques longueurs apparaissent. Le film se veut anti-didactique, et nous perd dans les méandres de son cauchemar. Voilà qui risque d'en rebuter plus d'un, d'autant que l'histoire a une connotation fortement sexuelle, plus ou moins bien masquée, et qui éclate dans le dernier quart à la face du spectateur.
Bon, au final, je suis pas sûr d'avoir tout compris, je ne pense pas avoir les références pour tirer toute la substantifique moelle de cette expérience à part. Dans la salle on était une trentaine, près de la moitié est sortie en plein milieu, et je m'attendais à plus. J'ai hésité, une ou deux fois, à les suivre, mais j'avais peur de louper une révélation, un moment de bravoure, quelque chose qui me ferais dire "putain c'est génial". Et génial, ça l'est sûrement. Je suis content de l'avoir vu, de l'avoir vécu, surtout. Pas sûr que je le reverrai, mais ce film m'aura marqué. Rien que pour ça, ça vaut le coup de tenter l'expérience (surtout pour les heureux possesseurs de pass illimités). A bon entendeur...