Critique de L'Étrangleur de Boston par LuluCiné
Le film en lui même fait preuve de brio aussi bien dans sa mise en scène que dans sa performance d'acteur, et le scénario (basé sur le roman de Gerold Frank The Boston Strangler) a pour lui d'être très documenté sur l'affaire DeSalvo dit l'étrangleur de Boston.
Le fait que le livre et que le film soient si proches en terme chronologique de l'arrestation de DeSalvo doit beaucoup aux détails de l'enquête sur un tueur en série qui a deffrayé la chronique à Boston.
Le film commence donc sur une enquête qu'on suit avec délectation, montrant aussi bien les erreurs d'investigation que l'impact des médias, tout en retranscrivant la peur des femmes, le tout avec un audacieux split screen que Fleischer a emprunté à une œuvre expérimentale. Le fait qu'à l'écran le spectateur soit confronté à plusieurs plans ajoute un bon rythme au film.
Le choix de se placer du côté des enquêteurs dès le début du film sans jamais voir apparaître le tueur, laissant planer ce fameux surnom d'étrangleur de Boston sans jamais pouvoir l'identifier, donne une réelle valeur à une enquête qui piétine. Cette première partie relate donc les faits du côté de la police, sans que jamais les scènes de crime ne soient explicites et provocantes, enlevant du même coup le côté voyeuriste que le film aurait pu tirer. On est donc pratiquement dans un documentaire.
La deuxième partie est l'exploration du tueur Albert DeSalvo ; beaucoup moins rythmée elle n'en est pas moins réussie grâce à la performance de Tony Curtis. Néanmoins cette chute de tension m'a trop gêné pour pouvoir pleinement apprécier cette deuxième partie. Le film traîne en longueur et prend le parti de la schizophrénie du meurtrier.
Et c'est justement là que le bas blesse pour moi : le film crée un tueur qu'on cherche à déculpabiliser par la maladie de sa série de meurtre commis, ce qui est extrêmement dérangeant quand on connaît l'affaire de l'étrangleur de Boston. Cette capacité qu'a Hollywood à s'approprier la figure du tueur pour ne pas la retranscrire dans sa juste mesure est agaçante, surtout quand la première partie du film s'appuyait fortement sur des détails et des erreurs qui relevaient quasiment du documentaire.
Autant le film tend à s'inscrire dans une non fiction, aussi bien en terme de mise en scène qu'en terme de scénario, autant il retombe finalement dans la fiction avec une fin qui m'a gêné car non véridique. Mais d'un point de vue filmique, et si on ne connaît rien de l'histoire, il a une forme très particulière des années 70 expérimentant et renouvelant le genre du fait divers. Et malgré quelques longueurs sur la fin, L’Étrangleur de Boston tire son épingle du jeu.