Un excellent exemple de film avant #metoo ! Un des derniers films hollywoodiens (qui en a la prétention, par son objet tout du moins) avant la révolution de 2017, puisqu'il date de 2016 ! Peu importe qu’il s’agisse d’un morceau de vie d’Howard Hughes, et qu'il soit l'un des derniers films de Warren Beatty, beaucoup de choses sonnent irréductiblement fausses. La jeune première qui minaude - pourtant jouée par la brillante Lily Collins, est lourdingue au possible, prenant les airs nobles d'Audrey Hepburn qu'elle ne parvient pas à avoir malgré son acharnement. Son personnage est fade, peu inspirant et son attirance pour le vieil homme sonne faux, et ne peut que sortir de l’imaginaire d’un vieil homme. Mais comme c’est littéralement le cas, on peut dire que c’est cohérent.


Papi-patriarcat est irrespectueux et insolent au possible exigeant sacrifice et patience à tout son entourage, au nom de sa folie, de son argent et de son prétendu "génie hors-norme", tout en étant incapable de penser aux autres. Un grand classique revisité ici, qui porte aussi le nom de masculinité toxique. Peut-être que c’est ça le véritable propos du film après tout, auquel cas, cette mise en abîme sociale de la figure du père puissant (argent et empire), tyrannique, ogre et monstre à la fois, limite incestueux (il a trois fois son âge et son "rival" piétiné pourrait être son fils) et est très bien incarné par notre vieil héros. Après, il faudrait revoir le titre. Car je ne vois pas en quoi une très jeune actrice attirée par son beau chauffeur et qui finit par coucher avec un vieux plein d’argent est une "exception à la règle" ? C'est plutôt malheureusement la règle d'une société malade.


La scène de la confession “daddy’s issues” d’Howard à Franck sur son propre père et sa névrose, a la même lourdeur que le reste, se finissant sur la lumière de la lampe qui se rallume enfin, vrai morceau de psychanalyse mainstream pré-digérée et grotesque.


La scène de perte de virginité de notre jeune pucelle par le vieil héros, est pudique (heureusement!) et presque amusante par la légèreté de sa mise en scène, mais met profondément mal à l'aise sur le fond. Non seulement elle est sous l'emprise de l'alcool (et pour la première fois de sa vie) et donc particulièrement naïve et vulnérable, mais sa religiosité ("pas avant le mariage") fait qu'il est très douteux qu'elle soit réellement consentante. La culture du viol raffole de ce genre d'ambiguïté et de l'inversion de la culpabilité comme celle qui traverse notre pauvre héroïne les deux fois qu'elle se met au piano pour chanter et que ça aboutit à quelque chose de sexuel.


On peut aussi préciser que la musique mélo-dramatique qui accompagne tout ça est elle aussi bien lourdingue.
On peut ne pas limiter ce film à ce qui saute aux yeux grâce au prisme du féminisme et dire qu'il est simplement mauvais.


Ce film a 5 ans mais parait déjà d'un autre temps.
Et heureusement.

lebo
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le 14 sept. 2021

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lebo

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