L’exemple parfait du film qui exploite pleinement son potentiel en allant à l’essentiel : des acteurs bien menés, un sens du rythme exemplaire et une narration maîtrisée. Il y a bien la séquence du duel entre Stewart et Marvin qui se détache un peu, mais sinon c’est véritablement le film dans son ensemble qui se grave dans les mémoires et non quelques points de détail en particulier. C’est certainement ce qui a fait la glorieuse réputation, on ne peut plus méritée, de L’homme qui tua Liberty Valance, un au-revoir émouvant au véritable Ouest sauvage qui sait rester simple.


Prenez un héros qui tente de régler ses comptes à grand renfort de textes de loi alors qu’il n’est pas capable d’aligner trois canettes avec son popgun dans une région reculée des états unis où les différents se règlent dans des nuages de poudre. Ajoutez-lui un cowboy valeureux qui ne sort fugacement de l’ombre de son rival que pour mieux saboter le monde dont il est pourtant l’un des rois. Et enfin gratifiez-les d’une demoiselle douce au verbe franc qui apporte une petite touche de charme bienvenue entre les steaks à point (sacrilège !) disproportionnés et la descente infernale des buveurs de whisky qui peuplent son établissement. Il n’en faut pas plus pour compléter la solide ossature d’un film qui joue la carte du triangle amoureux sans jamais sortir les violons : un point que tous les amateurs de westerns secs et nerveux apprécieront.


Comme ils valideront certainement le personnage qui surpasse tous les autres avec sa bobine patibulaire. Qu’on s’entende, Stewart et Wayne livrent tous deux une prestation remarquable, le second, notamment, en réussissant à jouer de son charisme légendaire sans jamais tenter de se hisser seul au sommet. Mais Lee Marvin est certainement encore une coudée au dessus en assassin à la mâchoire fermée, si virulent qu'on le jurerait capable de croquer son propre cœur un jour où la faim se ferait trop féroce.


Quand, à ces personnages marquants et ce pitch efficace, s’associe une mise en scène tirée au cordeau, la magie s’installe et les 2 heures du film filent à toute allure. Il y a certes quelques points de détails qui font tiquer, comme les tronches un peu trop grimées de tous ces vieillards qui se remémorent les dernières heures du Far West, mais rien qui ne se fasse oublier rapidement. Quant au petit twist final qui n’en est pas vraiment un, il est superbement amené, de quoi quitter tout ce petit monde avec l’envie de se repayer une tranche de bidoche, saignante cette fois-ci, de la filmo très riche de l’indomptable Ford, ou de celles de tous ceux qui se sont inspirés du bougre par la suite pour livrer leur version poussiéreuse, peut-être moins glamour, de cet Ouest morbide si passionnant.




Pour la version en images, c'est par là :)

oso
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le 31 juil. 2016

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oso

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