Dans la forme, L'Homme qui tua Liberty Valance est un western américain bien réalisé et bien joué. Son noir & blanc et son aspect 4/3 pourraient nous pousser instinctivement à le rapprocher des classiques des années 50, alors qu'il n'en est rien : il a été réalisé en 1962.
Et si le film joue ainsi avec son identité, c'est parce qu'il s'agit de bien plus que d'une énième histoire de cowboys au colt facile : c'est un western qui s’interroge sur le statut du western, sur la genèse des légendes de l'Ouest, et sur la légitimité de la loi des armes.
James Stewart est excellent en avocat cherchant à opposer ses livres de Loi à Liberty Valance, teigne locale jouée par Lee Marvin, qui aurait lui plus tendance à faire parler la poudre. John Wayne n'a pas vraiment d'estime ni pour l'un ni pour l'autre, tout en ayant des traits de caractère proche des deux.
Le film contient pas mal de scènes d'anthologie, qui bien souvent remettent en question l’approche classique du Western. Un excellent exemple est le concours de testostérone, scène cliché du genre, dégoupillée ici par un avocat furibond et incrédule que deux hommes soient sur le point de s'entretuer pour un morceau de viande !
Cette intelligence et cette autoréflexion perdurent tout au long du film ; et si quelques longueurs se font sentir par-ci par-là, elles ne nuisent pas au propos principal.
Il est très rare qu'un réalisateur mêle avec brio critique/parodie d'un genre et genre en lui-même au sein d'un film (Shaun of the Dead et Hot Fuzz viennent à l'esprit), mais c'est ici le cas : L'Homme qui tua Liberty Valance est à la fois un très bon western, et une réflexion intelligente sur le western. Il en utilise les codes ET les questionnent à la fois.
17/20