En 2013 sortait en salles le contestable 47 Ronins de Carl Erik Rinsch avec Keanu Reeves dans le rôle principal. Aujourd’hui The Last Knights, qui reprend également cette célèbre légende japonaise, ne bénéficie d’aucune date de sortie d’aucune sorte. Pourtant sans être excellent, il est largement meilleur que son prédécesseur, bénéficiant lui d’atouts qui manquaient cruellement à la version américaine de l’histoire.


Un réalisateur japonais tout d’abord qui, sans faire de discrimination d’aucune sorte, revêt une certaine crédibilité pour incarner toute la culture qui tourne autour d’une légende fondatrice du Japon. C’est très étonnant d’ailleurs de constater que, le film se déroulant cette fois dans un univers mélangeant l’Orient et l’Occident (contrairement à 47 Ronins qui est bien situé au Japon), le réalisateur Kazuaki Kiriya parvient à rendre beaucoup mieux la rigueur du bushido, à travers des personnages pas plus asiatiques que ne l’était Keanu Reeves. Sauf qu’ici, ça ne pose aucun problème, car Kiriya nous fait bien comprendre que cette légende est avant tout une affaire spirituelle, certainement pas d’effets spéciaux, de scènes d’actions et d’actrices sexys.


Un film plus sombre et sobre ensuite, beaucoup moins lancé dans une course à l’action et aux effets en tout genre, mais tout en retenue et en dialogues qui font sens. Le film de Kiriya, sans être un réel noir & blanc, choisit des décors qui portent très peu de couleurs et insistent avant tout sur le contraste entre la neige, les arbres et ces grands châteaux froids et humides. Il faut dire aussi que le metteur en scène a de réels talents d’esthète et qu’il n’a donc pas réellement besoin de faire de l’esbroufe. Si le film est moyen par moment, sur cet aspect il est une réussite incontestable: c’est superbe.


De meilleurs acteurs également. Pas question de faire ici du Keanu Reeves bashing, il le fait très bien tout seul, à ressortir son jeu monolithique des cartons pour chaque nouveau film: faire la gueule pour passer pour un dur. Clive Owen et Morgan Freeman élèvent tout de suite le niveau, celui d’acteurs qui peuvent revendiquer une carrière faite de grandes interprétations, dans de grands rôles, dans de grands films. Ici, pas question de pathétique tentative de faire passer Clive Owen pour un Japonais. Juste le jeu sobre et imprégné, d’acteurs qui ont conscience que le talent, c’est la capacité de faire parler un geste, une position ou une expression. Même Aksel Hennie, en « fumier de service », est particulièrement bon et abjecte.


Morale de l’histoire: si 47 Ronins a eu le droit incompréhensible de sortir en salle, alors The Last Knights doit faire de même, mais ça semble mal parti. Pourtant tout y est: une histoire qui fait écho à des valeurs humaines, un travail de mise en scène admirable et des acteurs reconnus. Mais les voix des distributeurs sont impénétrables, si ce n’est qu’ils nous font confondre de plus en plus les salles de cinéma avec le Futuroscope, privilégiant la performance technique à celle des acteurs et à ce titre 47 Ronins était, c’est vrai, mieux placé. C’est triste…


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le 5 juin 2015

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