(Vu en VO)


Dans un empire médiéval, jamais nommé, la paix règne (enfin, semble régner, j’y reviendrai), mais la corruption se répand et gangrène la société jusque dans ses plus hautes couches. L’entourage de l’Empereur demande aux nobles des «cadeaux», qui s’ils ne sont pas fournis, entraîneront pour leurs familles et leurs terres des conséquences désastreuses. Quand le seigneur Bartok (Morgan Freeman) refuse de se plier à ce chantage, il est exécuté, ses terres divisées entre d’autres familles nobles, ce qui laisse son armée, et particulièrement son commandant, Raiden (Clive Owen) désemparés et déterminés à se venger.


Bon, niveau scénario, on est donc sur quelque chose de classique, solide : une histoire de vengeance à la «47 Ronins». Ce n’est pas particulièrement original, mais bien traité, cela peut faire un bon film. Concernant le scénario, je n’ai pas trop de critiques : il est bien ficelé, et je n’ai relevé qu’un problème : on nous dit que l’empire est en paix depuis deux cent ans, mais le film s’ouvre sur... Une scène de bataille. Une bonne grosse scène de bataille dans une forêt enneigée, destinée à nous montrer les talents martiaux de Raiden et de ses hommes. Le film commence donc par se contredire, ce qui est d’autant plus dommageable que cette scène n’est pas lisible : les deux camps sont vêtus de noir, on ne dispose d’aucun contexte sur cette bataille, qui ne sera jamais expliquée. C’est dommage.


Le casting est tout à fait correct lui aussi. Morgan Freeman, Clive Owen,... Ce peut être un bon signe, mais cela peut aussi annoncer un film "alimentaire", du genre de ceux que ces grands acteurs font quand ils ont besoin de payer leurs impôts. Je craignais de devoir ranger ce film dans cette catégorie, mais au final, j'ai été plutôt agréablement surpris !


Visuellement parlant, ce film est réussi. L’architecture, notamment, grandiose au point d’en être grandiloquente, est très réussie. Les quelques paysages qu’on nous montre sont jolis, mais n’apportent pas grand-chose au film, en dehors de nous apprendre que ce monde est composé de vastes étendues glacées. Ce parti-pris est «rafraîchissant» (non, je n’ai pas honte) : l’action toute entière se déroule en hiver, et n’est pas si courant que cela. Cela installe une atmosphère déprimante qui colle parfaitement au film. Petit problème : cela colle relativement mal avec l’ambiance cosmopolite du royaume, qui comporte des noirs, asiatiques, blancs,... dans toutes les strates de la population.


Les costumes sont plutôt sympathiques. Ils ne cherchent pas à être réalistes, pas plus que les accessoires (épées,...), mais ils sont réussis. Côté musique, c’est adapté. Ça n’est pas une B.O. très marquante, mais elle fait son travail. Globalement, ils établissent bien l’identité des personnages qui les portent. Bref, sur ce point de vue, rien à redire.


Concernant les personnages et leur évolution, on nous épargne les poncifs du genre. Les personnages secondaires sont malheureusement très peu développés, surtout les hommes de Raiden. Seules quelques scènes permettent de leur donner une identité, de les associer à un rôle ou un comportement. Certains, comme Olaf (Dave Legeno) ont un physique hors du commun qui permet de les identifier sans difficulté, d’autres n’ont pas cette chance, et on se retrouve à se dire «mais... c’est qui, déjà, lui ?». Au moins, on ne nous inflige pas la énième histoire d’amour fortuite, et rien que pour ça, ce film a tout mon respect !


Après, il n’est pas sans défauts. Tout d’abord, et comme je l’évoquais, certaines scènes sont assez confuses, et notamment les scènes de bataille, où les protagonistes des deux camps portent des tenues très similaires. Ensuite, d’autres sont assez décevantes. La scène d’exécution de Bartok (vu que c’est littéralement dans le synopsis du film, n’allez pas crier au spoiler) est symptomatique de ce défaut : elle en fait trop. On sent que le réalisateur a souhaité faire monter la tension, transmettre au spectateur l’horreur que vit Raiden, forcé d’exécuter son maître, mentor et ami. Cependant, cette scène est longue. Très longue. Trop longue. Les plans sur les mains tremblantes de Raiden, son visage ou son épée n’en finissent pas, à tel point qu’on a envie de lui hurler «MAIS VAS-Y ! FAIS-LE, QU’ON PASSE À LA SUITE !». Et tout ça pour passer sur un écran noir. Le procédé aurait pu fonctionner si la scène qui le précède n’avait pas été aussi longue, mais ici... C’est juste agaçant, on ne peut s’empêcher de penser «tout ça pour ça ?».


Enfin, dernier défaut... La fin ouverte. Je ne vais pas spoiler en quoi elle est ouverte, simplement que le choix d’une fin ouverte ne fait pas de sens. Au vu de l’histoire des personnages, de leurs caractères, de leurs décisions, laisser au spectateur le soin de «choisir» ce qui se passe ne colle pas. Je pense qu’il aurait fallu une réponse claire sur la survie du personnage concerné. Mais au lieu de cela, on a la sensation que des pressions ont eu lieu pour tenter de sauver une «happy end» inexistante.


Bon, après, ce n’est pas un mauvais film. Il est même assez ambitieux par certains de ses aspects, quand il évoque une société multi-ethnique mais «égalitaire», le tout dans un climat froid qui sort des sentiers battus. L’action est plutôt bien gérée, la construction équilibrée,... Sans la fin ouverte et ses quelques défauts, je lui aurait mis un point de plus.

Julien_Collard
6
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le 11 juil. 2016

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Julien Collard

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