Schizophrenia.

Il est des films dont le tournage est plus intéressant que le résultat en lui-même. Cette nouvelle adaptation du célèbre roman de H.G. Wells en est le parfait exemple, désastre artistique autant que financier qui reste pourtant fascinant de par l'enfer de sa conception.

Initialement prévu pour Richard Stanley, qui donnera finalement sa démission au bout de quelques temps, le film va attérir entre les mains d'un John Frankenheimer plus très frais et incapable de gérer le bordel entourant la fabrication du métrage, pas aidé par un casting en totale roue libre, de Marlon Brando, endeuillé par le suicide de sa fille et dont on devra soufler le texte à travers une oreillette, à Val Kilmer, alors en plein divorce et en mode diva qui ira jusqu'à s'attifer comme Brando juste pour le faire chier en passant par un David Thewlis ne souhaitant que la fin de tout ce cauchemar et par le refus de Fairuza Balk de porter des prothèses. Tout cela sous le regard de Richard Stanley, revenu sur le tournage incognito grimé en créature.

Un sacré bordel donc, qui va donner un résultat pas si catastrophique que ça. Car si le film est effectivement raté, hésitant constamment entre blockbuster lambda et réflexion quasi-oedipienne sur l'infime barrière qui sépare l'homme de l'animal, et partant rapidement dans tous les sens, le produit fini garde un certain pouvoir de fascination, la folie ambiante qui s'est emparée du plateau transparaissant à chaque seconde à l'écran, apportant une certaine ambiance à la fois angoissante et malsaine, délétère et schizophrène au film de Frankenheimer.

Un film malade qui aurait sûrement pu être grandiose, entièrement bouffé par l'égo de ses stars, mais qui paradoxalement parvient à intriguer, en premier lieu grâce à son enfantement laborieux et à des maquillages de toute beauté et aux comédiens qui les incarnent. A ranger aux côtés du "Dune" de David Lynch et du "King Kong" de John Guillermin.