L'Inondation
6.3
L'Inondation

Film de Louis Delluc (1924)

Pour moi, jusqu'ici, Louis Delluc, c'était juste le nom donné à un prix récompensant un film français chaque année. Maintenant, grâce à la vision de son oeuvre ultime (avant son décès à seulement 33 ans !), L'Inondation, c'est aussi un cinéaste à part entière.


J'ai lu sur sa page Wikipédia, je cite :



Il utilise le décor naturel, supprime les gesticulations et les
péripéties.



Pour les décors naturels, je suis pleinement d'accord et c'est ce qui fait l'intérêt de ce film (et peut-être de ce style, je vous le dirai quand j'aurai vu d'autres œuvres du monsieur !). Et j'irai même plus loin. Il a vraiment d'autres belles touches de réalisme. Ce marché de rue, il est visible que cela en est un véritable. Cela a une valeur d'une authenticité inestimable. Et tant pis s'il faut sacrifier à quelques regards vers l'objectif de la caméra. Et ces plans d'une véritable crue, ils sont impressionnants. C'était une excellente idée d'intégrer cela dans un film de fiction pour rendre la toile de fond plus crédible.


Pour les péripéties, mouais... il y a quand même de la péripétie. Des péripéties, en plus assez prévisibles de bout en bout, avec en prime une méga-giga invraisemblance de gros malade.


Le médecin jette à peine un coup d’œil sur le corps d'une noyée et il dit que c'est un meurtre. Plus tard, à travers un flashback, le spectateur voit le père du personnage principal pousser la victime dans la flotte. Juste la pousser, c'est tout, sans l'étrangler ou la violenter avant, donc sans aucune trace quelconque de strangulation, de coups ou de griffures. Sans indices d'agression, personne ne peut pas savoir si c'est soit un accident, un suicide ou un meurtre. Il peut être juste constaté que la malheureuse s'est noyée.


Les gesticulations, euh... autant Ève Francis (actrice fétiche et, accessoirement, épouse du metteur en scène !) et Edmond Van Daële restent, dans les rôles du père et de la fille, relativement (je dis bien relativement, et encore par comparaison !) sobres, autant Ginette Maddie en fait des tonnes dans le rôle de la fiancée jalouse. Elle donne l'impression qu'elle ne peut pas faire autrement que de secouer le plus possible les épaules, de lever au maximum la tête et d'ouvrir très grand la bouche façon Olive et Tom pour bien montrer combien elle rigole trop sarcastiquement.


Sinon (en dehors des propos de la page Wikipédia !), le spectateur n'est pas trop un demeuré, il est tout à fait capable de comprendre par lui-même que lorsque la protagoniste regarde longuement la couverture d'un périodique avec une femme en robe de mariée dessus, c'est qu'elle rêve d'épouser l'homme dont elle est amoureuse. Une surimpression explicative n'était pas franchement nécessaire des masses. Pareil pour la métaphore, elle aussi en surimpression, de l'eau et du type qui s'excite trop sur sa fiancée en regardant le fleuve, c'est d'une grande lourdeur. Et je ne parle même pas de la lettre à chaque fois emportée par le vent quand celui à qui elle est adressée se précipite pour tenter de l'attraper (un bon coup de vent et paf directement dans le courant qui mouille n'aurait pas été un peu plus fin ? Sérieux ?).


Bref, pour son côté documentaire, le film vaut incontestablement le détour, pour le reste par contre, surtout quand ce n'est pas du tout en cohérence avec ce que le réalisateur a professé, on repassera.

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le 7 avr. 2021

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Plume231

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