Dernier film tourné par Fritz Lang sur le sol américain avant son retour en Allemagne, juste après "Where the city sleeps", dont il partage le même acteur principal, en la personne de Dana Andrews, "Beyond a reasonable doubt" en est d'une certaine manière l'exact contrepoint.
En effet, tandis que le premier était centré sur la description d'un milieu (l'univers médiatique) au détriment de l'intrigue policière, bâclée, le second mise tout au contraire sur un scénario tendu et truffé de rebondissements, laissant de côté tout le reste, l'arrière-plan étant esquissé grossièrement.
Le point de départ est le suivant : un directeur de journal farouchement opposé à la peine de mort suggère un jour à son ami écrivain (Dana Andrews, dans son meilleur rôle) l'idée de mener une expérience radicale, visant à prouver l'inanité et l'injustice de la peine capitale : partant d'un fait divers meurtrier, ils créeront de toutes pièces des "indices indirects" qui accableront notre héros et le mèneront à une condamnation à mort - pour après le verdict exhiber les preuves de son innocence!
Je n'en dirais pas davantage pour ne pas spoiler, mais sachez que Fritz Lang réussit un tour de force scénaristique, manipulant son public dans toutes les directions avec une virtuosité vertigineuse.
Dans le même temps, le réalisateur allemand signe un convaincant réquisitoire contre la peine capitale, même si les rebonds capricieux du récit viennent nuancer, voire contredire, l'idée d'un film à thèse.
Quoi qu'il en soit, "Beyond a reasonable doubt" constitue une belle réussite dans la riche filmographie de Fritz Lang, qui signe une mise en scène sèche et épurée, toute entière au service de son scénario diabolique, à peine affaiblie par quelques invraisemblances ou facilités, destinées à favoriser la mécanique de ses rouages bien huilés.
A noter qu'il existe un remake contemporain de cet excellent thriller, réalisé en 2013 par Peter Hyams, avec Michael Douglas et Jesse Metcalfe dans les rôles principaux.