Biopic du célèbre commandant Jacques-Yves Cousteau, L’Odyssée s’attache à retracer la majeure partie de sa vie depuis son poste à la Marine Nationale Française jusqu’à la création de la Cousteau Society en 1973. Passionné par la vie sous-marine et l’exploration, Cousteau n’aura de cesse de vouloir tout comprendre, tout découvrir, tout montrer au public à travers de nombreux documentaires. A bord de la Calypso, son navire loué en 1950, le commandant part alors aux quatre coins du monde aux côtés de sa femme Simone, laissant ses deux fils en pension en France. Quelques années plus tard, son plus jeune fils Philippe le rejoint pour participer à la création de films documentaires financés par une chaîne de télévision américaine. Touché par les questions écologiques alors que son père n’en a cure, Philippe finit par se brouiller avec le commandant. Mais quand les soucis financiers de Cousteau prennent le dessus, le cadet revient auprès de son père pour une mission en Antarctique et parvient à le sensibiliser à la protection des océans et des espèces menacées, ce qui aboutira quelques années plus tard à la création de la Cousteau Society.


Tragédie familiale


Si L’Odyssée est bien un biopic, c’est avant tout une histoire de relation père-fils. Le choix de Jérôme Salle de raconter la vie de « JYC » à travers le prisme de sa relation avec son fils Philippe donne du mordant à ce film et dépasse le simple récit didactique. Les caractères antagonistes des deux personnages et leurs vues diamétralement opposées sur le monde sous-marin permettent de mettre en lumière les différents aspects de la personnalité du commandant. Séducteur invétéré en quête permanente d’argent, homme de communication et de contrôle, Cousteau n’en reste pas moins un homme au grand cœur, mais un homme avec ses faiblesses, magnifiquement interprété par un Lambert Wilson amaigri pour le rôle. Un homme qui, avec ses rêves de conquête, en oublie sa famille et ses valeurs profondes. Sa femme Simone, en sera la première touchée. D’abord pleine de vie et de rêves, elle sombre peu à peu dans l’amertume et l’alcoolisme, refusant de se rendre au mariage de son fils et faisant de la Calypso son seul refuge. Audrey Tautou incarne à la perfection cette femme de marin au caractère bien trempé. Le premier fils de Cousteau, Jean-Michel, sera lui aussi l’un des dommages collatéraux des ambitions de son père, disparaissant tout bonnement de sa vie (et du film) pour ne réapparaître que par touches succinctes. Porté à l’écran par un Pierre Niney bluffant, Philippe sera finalement le seul à se confronter frontalement à son père et à refuser de vivre dans son ombre. Son combat pour l’écologie et la protection des océans l’amènera peu à peu à retourner vers son père et à le sensibiliser à cette grande cause.


Une odyssée humaine et écologique


Malgré quelques impasses sur la vie mouvementée du commandant (notamment ses deux autres enfants nés d’une seconde union), et un fils aîné un peu trop occulté, Jérôme Salle réussit avec L’Odyssée à sortir du carcan du simple biopic chronologique pour nous livrer un film d’aventures haletant. Aventures familiales, marines, amoureuses, portées par des images magnifiques tournées aux quatre coins du globe. Fidèle aux derniers désirs d’un commandant certes imparfait mais qui a réussi avec brio sa rédemption, le film se veut aussi le vecteur d’un message écologique fort. Si Cousteau a d’abord été totalement insensible aux questions écologiques, massacrant requins et cachalots, et détériorant le monde sous-marin pour ses documentaires, il a ensuite compris l’importance de protéger ces écosystèmes : « Il y a plus de trente ans j'ai découvert un nouveau monde. J'ai voulu le conquérir alors qu'en fait il fallait le protéger ». La rédemption aura été longue, et n’excuse en rien les actions passées, mais elle aura au moins eu le mérite de faire avancer les choses en créant un héritage immense, avec, entre autres, la création du moratoire de 1991, un traité qui interdit toute exploitation des ressources naturelles du continent blanc jusqu’en 2048.


Un film donc humain et touchant, servi par un propos intelligent et des images sublimes, qui pose un regard nuancé sur le personnage mythique du commandant Cousteau.

Créée

le 31 oct. 2016

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manouperrin2

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