La traversée des apparences
On savait la capacité d'Ang Lee a susciter une émotion vive et vraie de par ses précédents longs-métrages souvent impressionants et intense autant au niveau visuelle que spirituelle, ici il unit avec brio ces deux dimensions et signe son plus beau film.
Une famille indienne moderne
A Pondichéry, une famille composée du père, de la mère et de deux garçons. L’un est ce que l’on attend de lui, l’autre passe par davantage d’errances spirituelles et culturelles, se pose beaucoup de questions théologiques et religieuses, ce qui déplaît à son père qui veut qu’il reste libre et maître de ses choix.
God bless me
Mais c’est pour trouver la foi que Pi tâtonne ainsi, se tourne vers différentes religions et attend la révélation, une manifestation de Dieu. Il cherche le cherche à la manière des stoïciens dans toutes les choses de la nature et soutient, contre son père, que les animaux ont une âme. Ainsi ce que son père prend pour un asservissement prématuré est en fait la manifestation d'une autonomie d'un esprit déjà affirmé.
In the sea you can remember your name
Pi est un garçon prénommé Piscine à la naissance à cause de la passion de son père pour la natation et pour tester les piscines du monde entier, une particulièrement l'ayant particulièrement charmé : la piscine Molitor à Paris.
Un prénom, comme on l’imagine aisément, plutôt difficile et lourd à porter et qui lui vaut de nombreuses brimades de ses camarades.
Eye of the tiger
Richard Parker est le tigre du zoo tenu par les parents de Pi. Lequel pensent que les animaux ont une âme. Son père lui prouve le contraire en attachant une chèvre à la grille de la cage pour que Richard Parker la dévore toute crue, pourtant ce dernier devient bientôt l’unique compagnon de naufrage du garçon et l’animal que donc il suit. La peur disparaît au fur et à mesure que le lien se tisse.
Don’t rock my boat
Absorbé par l’immensité des flots et placé en condition de survie extrême, Pi doit, comme Robinson, se réinventer de A à Z pour survivre dans cet univers hostile avec le peu qu’il a. Cette position est d’autant plus intéressante que cette Odyssée semble en tout point être pour lui un destin. Et peut-être en même temps une épreuve que le seigneur lui envoie pour l'accomplir et du même coup s'accomplir.
Des visions mystiques et surréalistes
On se rappelle L'oncle Bonmee de Apichtapong Wherestakhul devant les visions fantastiques de Pi (réelles ou imaginaires) lorsque l'embarcation de survie semble être suspendue dans le temps et l'espace avec la possibilité d'apercevoir toutes les choses comme dans un kaléidoscope magique et infini engageant une réflexion sur la place de l'homme dans le cosmos. Moment de grâce dans le désespoir, on pense au chateau d'Argol de Julien Gracq par cette absorption de l'homme par la nature immense et les flots. Aux réfléxions pascaliennes. Ou encore aux tableaux surréalistes de Dali.
The end of the Odyssea
Impossible de ne pas sentir le déchirement une fois la terre ferme atteinte et l'ultime regard lancé vers l'Ami qui n'a plus que les os et la peau qui disparaît à jamais dans la jungle. La fin d'une vie, qui sest passé quelque part, en dehors du monde, entre la mer et les cieux. Une épopée qui transfigure l'homme et rend à jamais sa vie et son rapport au monde plus authentique.
