On l’oublie souvent mais le cinéma italien a été un vivier du cinéma bis et un vrai laboratoire. Avec peu de moyens et pas mal d’ingéniosité, il a su créer un univers propre entre réalisme et onirisme. Souvent, je parle de mon amour pour le cinéma de de Palma en oubliant qu’il partage avec Argento et d’autres (Lenzi peut-être aussi) un héritage commun. L’Oiseau au Plumage de Cristal est le premier long métrage d’Argento. On y trouve toutes les qualités du giallo, genre purement italien très influencé par le cinéma anglo-américain. L’histoire est celle d’un type qui est témoin d’une tentative de meurtre. Pas tout à fait de plein gré, il va se retrouver à mener l’enquête et donc à se mettre en danger. Un pitch simple donc, classique même. Mais l’intérêt est avant tout sur le terrain visuel. Entre la première scène de violence qui questionne le regard du spectateur et joue sur sa perception en manipulant le son et toutes les références au jeux de regards, on nous place chez Hitchcock et chez Michael Powell (critique du Voyeur à venir). La photo en clair-obscur, la construction des plans, le jeu sur les formes de l’archi, le contraste des décors … c’est un ravissement de tous les instants et on pardonnera alors une interprétation un peu faiblarde. Contrairement aux usages, Argento ne va pas vouloir trop en faire dans ce premier film et il ne paraît pas surchargé d’intentions. Des pistes de travail, il y en a mais elles seront développées dans les films suivants jusqu’à l’épure. A noter également, la très bonne partition d’Ennio Morricone. En bref, un très bon thriller au rythme surprenant qui mérite que l’on n’attache pas trop d’importance aux premières images.