« Il n’y a pas de fumée sans feu », est un proverbe qui définit bien ce film, L’amour est un crime parfait, réalisé par les frères Arnaud et Jean-Marie Larrieu. La fumée habituellement légère et voluptueuse est ici pesante et écœurante, un symbole d’oppression qui caractérise bien l’atmosphère dans laquelle baigne ce film. Elle prend une place centrale, un mystère qui plane et floute, comme la brume du lac Léman en adéquation avec la neige, ou encore la fumée du souffle brûlant qui se mêle à la température glaciale des Alpes franco-suisses.


L’histoire morbide est celle d’un professeur très attirant de Littérature, impatient de l’arrivée du printemps et multipliant les conquêtes sexuelles avec ses étudiantes, « chair fraîche » du campus universitaire, jusqu’à ce que l’une d’elle disparaisse.


Tout repose sur l’immatérialité de la fumée, retranscrite à travers le vide de ses cours, le vide de sa vie amoureuse, vide comblé par le plaisir sexuel, la luxure, le plaisir de la cigarette. L’excès de cigarettes, d’ailleurs filmées incessamment et minutieusement, à l’aide de plans rapprochés, donnera à certains une furieuse envie de fumer à la sortie de ce film ! A d’autres, ces images provoqueront un profond dégoût.


La nudité n’est pourtant pas de caractère choquant, ou vulgaire, elle prend une dimension presque normale dans ce film rempli de désirs, de lubies sexuelles et de fantasmes. La nudité est filmée à travers les vitres et les miroirs, le sexe quant à lui n’est pas montré, on ne le comprend qu’implicitement ou à travers le bruits des ébats.


Bien que le protagoniste soit l’unique « schizophrène fou », personnage poursuivi par sa mauvaise réputation et son enfance sombre, les autres personnages ne sont pas complètement nets non plus. Le film nous brosse un tableau malsain qui n’est pas sans amertume.


Son caractère moderne repose sur la libération des mœurs, l’absence de tabous face au sexe, la séduction et les relations sulfureuses qui se relayent au court du long-métrage. La modernité est aussi représentée par la cigarette électronique, élément nouveau dans notre société, et l’architecture de verre de l’université en parfaite harmonie avec l’extérieur. Le paradoxe chaud/froid, omniprésent, est établi par la confrontation du verre pour l’université et du bois pour le chalet, l’un glacial, l’autre chaleureux, l’un moderne, l’autre traditionnel. Ces deux lieux, sont reliés tout au long du film, par la voiture, témoin des méfaits commis ; en effet, la trame narrative se partage entre ces trois endroits, filmés en haute définition, de manière presque documentaire : on ne s’ennuie pas, on admire.


Le cadre luxueux camoufle bien la perversité des personnages, leur côté malsain et entêtant, allant des liaisons extra-conjugales à l’inceste entre frère et sœur, professeur et bibliothécaire. De plus, la complicité exagérée de Marc et sa soeur se traduit par un besoin de proximité incessant, aussi bien dans le chalet qu’ils partagent que dans leur lieu de travail commun.


Le feu clôture ce long-métrage, la mort de ce personnage, à la vie enflammée, autant de désirs que de folie, renvoie aux flammes qui rongent et tourmentent son esprit dérangé ; il est la réponse à une enfance meurtrière, le reflet de son premier meurtre, celui de ses propres parents, réduits en cendre.


Mathieu Amalric alias Marc, s’éteint alors comme ses parents, mettant fin à l’embrasement écœurant, de sa vie et de son entourage, dont il est responsable.

LlénaConnan
7
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le 24 déc. 2016

Critique lue 228 fois

LlénaConnan

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