Dans le quartier, il y a plus de pouffiasses que de pasteurs

Dialogues percutants, gouaille parisienne et populaire, ironie n'épargnant aucune classe sociale, acteurs aux nombreux talents, rythme haletant, scénario maintenant savamment le suspens: voilà les éléments d'un excellent film policier bien français, aussi bien dans le fond et la forme.


Bien français, en effet, et ce n'est pas Audiard qui le démentirait. A l'heure où la mode US a tout (ou presque) globalisé sur son passage à grands coups d'effets spéciaux Monsanto et de vide intellectuel Coca-Cola, ça fait du bien de sentir un peu le terroir, celui de notre France, pas la ridicule carte postale de Montmartre de Woody Allen, mais celle où l'on cause vrai et franc, où l'on te renvoie aussitôt à la gueule ta claque verbale, de cette main lourde de la poix mentale recouvrant les bastringues et les rues sombres, celle qui renifle encore un peu le fumier et surtout l'argot du ruisseau. Cette même main métaphoriquement patriote qui, dans la dernière scène, arrête celle de l'autre, assassine celle-ci, qui, du haut d'un bras tendu comme un salut fasciste, a commis l'irréparable faute et devra payer de ses crimes contre l'humanité.


Car l'Homme est pourri par la luxure, le mensonge, l'envie, le crime, et bien d'autres vices. Cependant il vaut mieux en rire, et ce n'est pas Clouzot qui l'aurait nié. A partir d'un microcosme intelligemment choisi, comme un échantillon d'une société française de l'époque dont il peint le portrait grinçant quoique toujours comique, il révèle certes entre les lignes les causes du Mal dont a été frappé son pays et ses habitants en pleine guerre mais cherche surtout à plaire à un public qui mérite un peu de bonne humeur en cette sale époque où la menace guette au coin de chaque rue.


Jouissif, même si la fin se perd dans les méandres de l'intrigue policière. Un grand film dont il faut être fier comme d'une cocarde.

Marlon_B
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 26 nov. 2017

Critique lue 234 fois

1 j'aime

Marlon_B

Écrit par

Critique lue 234 fois

1

D'autres avis sur L'assassin habite au 21

L'assassin habite au 21
raisin_ver
9

La bonne adresse

Formidable comédie policière, à l'interprétation fabuleuse et à la maîtrise épatante, dès les premières minutes d'ailleurs, la scène d'ouverture du film étant un bijou à l'atmosphère enfumée et...

le 29 déc. 2011

54 j'aime

L'assassin habite au 21
Grard-Rocher
8

Critique de L'assassin habite au 21 par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Dans le quartier de Montmartre, au numéro 21 de la rue Junot, un endroit bien paisible, se situe la non moins calme "Pension des Mimosas". Toutefois ce calme est relatif, car il s'y passe des choses...

47 j'aime

9

L'assassin habite au 21
Ugly
8

L'auberge rouge

Premier film réalisé par H.G. Clouzot, L'Assassin habite au 21 est un des chefs-d'oeuvre du cinéma français de l'Occupation, qui a diverti les Français privés de films américains appartenant au genre...

Par

le 28 févr. 2017

35 j'aime

10

Du même critique

Call Me by Your Name
Marlon_B
5

Statue grecque bipède

Reconnaissons d'abord le mérite de Luca Guadagnino qui réussit à créer une ambiance - ce qui n'est pas aussi aisé qu'il ne le paraît - faite de nonchalance estivale, de moiteur sensuelle des corps et...

le 17 janv. 2018

30 j'aime

1

Lady Bird
Marlon_B
5

Girly, cheesy mais indie

Comédie romantique de ciné indé, au ton décalé, assez girly, un peu cheesy, pour grands enfants plutôt que pour adultes, bien américaine, séduisante grâce à ses acteurs (Saoirse Ronan est très...

le 17 janv. 2018

26 j'aime

2

Vitalina Varela
Marlon_B
4

Expérimental

Pedro Costa soulève l'éternel débat artistique opposant les précurseurs de la forme pure, esthètes radicaux comme purent l'être à titre d'exemple Mallarmé en poésie, Mondrian en peinture, Schönberg...

le 25 mars 2020

11 j'aime

11