Difficile de trouver les mots pour ne pas ébrécher la splendeur de l’œuvre que je viens de voir. Délicatesse serait pour moi serait le mot le plus adéquat pour définir la manière dont cette histoire nous est contée. Un film qui retranscrit parfaitement ce sentiment de mélancolie et de perte de repère lorsqu’on découvre l’amour et la mort, une représentation sublime et douloureuse du deuil. On pourrait dire que c’est un film sur le deuil, sur la quête de l’amour, du bonheur, en réalité, c’est un film sur la vie et même véritablement un hymne à la vie.


Dire que le film est esthétiquement superbe est vrai mais c’est peu dire tant il a beaucoup plus à offrir. Les mouvements de caméra caressent le destin des personnages avec une délicatesse (LE mot d’ordre) infinie , s’attardant à dépeindre tour à tour les peines et les joies de ces êtres somptueusement imparfaits, torturés, s’accrochant, lâchant prise et finalement essayant simplement de survivre à cette épreuve qu’est la vie. L’utilisation de la musique et des silences est d’une intelligence rare magnifiant chaque instant du métrage. Les acteurs semblent réellement habités par leurs personnages.
D’autre part, Tran Ahn Hung sait ce qu’il est pertinent de montrer ou de taire et parle de sujet aussi dur que le suicide avec une grande pudeur sans pour autant l’aseptiser. Un regard, un long silence, une main en serrant une autre, peu de dialogues mais des dialogues vrais, simples et en disant beaucoup plus, voilà comment le cinéaste nous parle et nous émeut. Watanabe, le héro, sert de repère émotionnel au spectateur puisqu’il est probablement le plus stable et le plus fort et il croisera dans son périple amoureux des personnes se cherchant, au travers de son amitié ou de son amour. Il apprendra de ses expériences mais se perdra lui aussi.
On parle ici de personnages jeunes qui découvrent tout, la sexualité, l’amour, la mort et cette confrontation est violente, tout partira du suicide du meilleur ami du héro. Il est d’ailleurs intéressant de constater que le récit se focalise sur les conséquences du suicide sur les autres et non sur les motivations du défunt, qui resteront volontairement obscures . Keiko, la veuve, vivra avec cette incompréhension toute sa vie. Le héro dit très justement en voix off que rien ne saurait nous soigner de la perte d’un être cher, ni la gentillesse, ni le temps, ni l’amour. On continue de vivre, d’avancer, avec ce constat immuable. Le film nous montre que la vie, dans toute sa fatalité n’obéit à aucune règle, ne repose pas sur un quelconque équilibre mais que, ce périple chaotique nous offre des moments de grâce, de plénitude, de bonheur, tout cela grâce à l’amour, vecteur essentiel d’espoir et de survie. Car en dépit de la dureté de certaines scènes et du funeste destin de certains personnages, le métrage sait rester optimiste et nous parle finalement beaucoup d’amour, de personnages qui luttent avec noblesse et font face à leurs problèmes, quels qu’ils soient.
Et oui, ça fait un peu leçon de vie… Mais c’est avant tout une superbe fable humaniste, humble, d’une profondeur inouïe, un poème viscéral dont on ressort ému et grandi.
Je ne saurais que trop vous conseiller de vous précipiter voir ce chef d’œuvre.

LudovicMerger
9
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le 16 mars 2017

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Ludovic Merger

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