La Bande à Baader, et c'est peut être là le problème éthique qu'il a pu, en Allemagne, poser, est un film de gangster. Dense, riche, survolté.
Long de ses 2h30 qui passent avec grande vitesse, de part le rythme poussé et maintenu sans baisses durant toute sa longueur (même le générique, rythmé par la musique de Bob Dylan semble passer vite, c'est dire !), La Bande à Baader prend ainsi le risque de 1) s'attaquer à un événement historique récent et de 2) traiter ses personnages, aux actions violentes, aux vocations politiques et aux valeurs discutables dans le genre d'un grand film de gangster.
Aucun regard moralisateur n'est porté sur les membres de ce groupe violent et immature (on pense leur grande jeunesse et irresponsabilité à l'origine de leurs meurtres et de leur désir rebelle d'anarchie) et le spectateur peut même ressentir, comme dans tout bon film de gangster, une certaines excitation durant le visionnage, un attendrissement parfois, lorsque le réalisateur nous montre ses "héros" dans leur intimité.
Et pourtant, si les scènes d'actions et le récit, plus globalement, paraît traversé d'un souffle romanesque, ce n'est pas du tout le cas. Le film est le résultat de minutieuses recherches documentaires et historiques. Ainsi certains dialogues (lors des procès par exemple, ou de certaines interviews) sont minutieusement retranscrits et les lieux de tournage (plus de 120 !) sont en partie ceux-là même qui ont, dans la vraie vie, été les lieux d'événements tragiques. On penche donc plus du côté du réalisme, que des scènes d'actions, aussi immersive que stimulantes, soulignent par le brio de la caméra qui les filme, le montage énervé qui les sert et la violence froide qui en résulte.
C'est donc une superbement réalisée (et angoissante) scène de foule qui ouvre le film.
Servie par une B.O. survoltée, une plongée minutieuse dans une époque chargée de tension mais à la mode résolument décomplexée (la drogue, les pattes d’éléphant, et la libération sexuelle) le film se charge d'une énergie électrique d'une jeunesse qu'incarnent parfaitement les nombreux comédiens.


Nombreux car, oui, en 2h30, Uli Edel a le temps (et en même temps si peu de temps) pour brosser 10 ans qui ont fait trembler la RFA et, plus globalement, l'Europe, et tous les personnages qui y ont agi. Ainsi le film a parfois des aspects brouillon, les relations entre personnage, et même parfois jusqu'à leur identité, restent floues, les liens mal dessinés. L'impression reste parfois en tête d'un film bordélique, parfois pas très bien construit, qu'une fin vient clore avec rugosité et maladresse, quoique violence cinglante quant au destin des personnages que l'on a suivi depuis 2h30.
Ainsi Uli Edel nous rappelle que ces jeunes que l'on voulait voir gagner, dont on s'était plu à suivre la vie mouvementée, n'étaient pas les héros que le film a parfois eu faussement et avec ingéniosité tendance à mettre en scène.

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le 6 mars 2016

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Charles Dubois

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