Le seul film où la figure boudeuse et détachée de Léa Seydoux m'a paru agréable. Dans ce film, elle est magnifique, au centre de toutes les attentions, un peu paumée mais sous ses airs fragiles très destructrice. D'abord de la vie d'Otto, amoureux éperdu qui finira par se perdre définitivement et puis de celle de Nemours son prof d'italien qui quitte sa vie de tombeur pour être l'homme d'une seule femme qui pourtant le rejette tout en étant jalouse d'une lettre d'amour qu'il n'a pas écrit, elle croit à la supercherie, ça suffira pour qu'elle disparaisse un instant et fasse peur à tout le monde. Ce côté accaparent de la figure de Junie pourrait agacer, or c'est le propos même du film, transposition moderne de "La princesse de Clèves" qui avait soulevé le tollé de la critique par l'aveu qu'elle fait à son mari dans la forêt. Ici, le traitement est libre, réaction aux termes dégradants du président Sarkozy sur la possible lecture de "La princesse de Clèves" par tous.

Là dessus Honoré répercute des personnages passionnants,mystérieux, renforçant l'attraction de son personnage principal et la figure volage et transformée peu à peu de Nemours (Louis Garrel, hilarant dans le rôle du prof pas trop crédible en somme, il s'amuse et ne prend pas grand chose au sérieux, une des forces du film), il fait graviter autour d'elle des personnage comme Agathe Bonitzer ou Anais Demoustier qui sont toutes deux parfaites dans leurs rôles respectifs. Otto est déchiré et enfantin, le jeune premier Grégoire Leprince Ringuet lui prête sa tête blonde et innocente et sa voix pour l'une des plus belles partitions musicales ("Comme la pluie") de Beaupain , compositeur fétiche et double d'Honoré. Le café, centre des retrouvailles est tenu par le personnage de la patronne, touchante et véridique.

Honoré livre ce qu'il sait le mieux écrire et réaliser depuis "Les chansons d'amour" : l'amour dévorant et abyssale parce que quasiment impossible, le deuil, le désir et toujours cette légèreté-gravité des amours qu'il sait si bien écrire et que Beaupain met très magnifiquement en musique. C'est aussi ces personnages là que met en scène Honoré, les petits bourgeois d'aujourd'hui, ceux qui ont le confort et donc le temps de faire de l'amour une poésie, une chanson, un conte et d'en faire tout un drame intellectuel...
eloch

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