-J'ai une idée -Y a pas pire pour un homme -Je sais

Disney n'est pas que le studio qui fait rêver les enfants et dont on se souvient avec délectation et nostalgie. Et la preuve, c'est qu'on peut découvrir un classique comme La Belle et la Bête a l'âge adulte, à un moment ou on s'ouvre à l'animation de tout horizons et ou certains des films que l'on avait aimé enfants n'ont plus ce même charme, et être émerveillé quand même. Bon, voilà, c'est ce qui s'est passé avec celui-là. Sans doute parce que objectivement, il fait très fort, il faut bien le dire.

Certains reprochent les errances de l'animation. C'est vrai que des erreurs sont souvent visibles dans le dessin. Mais dans la mesure ou la qualité de l'ensemble, au côté de cela, est excellente, on les oublie face au visionnage. En effet, les dessins se sont grandement améliorés depuis "La Petite Sirène", dont je n'aimais pas forcémment le character-design, pour offrir des personnages d'apparence beaucoup plus agréable. L'animation est crédible malgré ses estimations, et largement meilleure que dans tous les autres studios de l'époque (excepté Ghibli). Et si on repère aisémment les incursions de la 3d ici ou là de nos jours, force est de reconnaître qu'à l'époque, ce devait être reussi. Enfin, notons des décors absolumment superbes, rendant chaque paysage et bâtiment plus beau qu'il ne le serait reellement , particulièrement le chateau de la Bête et la scène d'ouverture tout simplement stupéfiante, au point que j'en ai fait un arrêt sur image et que je pourrais m'écrier comme une enfant : Non mais c'est trop trop beau !!!! Bref... trêve de délire.

En partant du classique conte de fées, on aurait pu s'attendre à une énième variation autour du coup de foudre, mais il n'en est rien. Ici, plus que du conte, c'est de l'histoire d'amour que tient le film. Ainsi, Belle est d'abord effrayée par la Bête. Aucun sentiment à son égard ne retient la jeune fille au chateau, elle qui s'est sacrifiée pour son père. La Bête, de son côté, rendue aigrie par ses années de souffrance, en plus de son caractère déjà vaniteux et capricieux, ne sait pas s'y prendre, jusqu'à ce qu'il se décide à changer, d'abord pour briser le charme (égoistement donc), puis par véritable amour. Ce changement, faisant éclore la vraie nature du personnage, finit par toucher Belle, qui tombera à son tour amoureuse. Résultat : cette succession d'étapes visibles dans les sentiments nous rendent leur relation credible, sinon touchante, à mille lieux des romances totalement irréelles des oeuvres précédentes. Une romance dont toute la portée, à la fois sur le changement des personnages, et dans sa dimension romantique, est resumée par une unique réplique :
- Pourquoi vous l'avez laissé partir ?
- Parce que je l'aime.
Cette romance est d'autant plus belle que les personnages sont très réussis. Belle, ainsi, est une héroine féminine merveilleusement améliorée. Sa principale qualité est ainsi son intelligence. On la trouve aussi, tour a tour, courageuse, dévouée, instruite, indépendante, et, aussi, rêveuse et sensible, ce qui n'a pas à être considéré comme des défauts. Elle est ainsi la première princesse à ne pas rêver d'amour, mais simplement d'amitié, se sentant seule dans son village de rustres et différente. La Bête, lui, est un être touchant, dont la souffrance, puis la sollicitude chavirent les coeurs. Personnage merveilleusement défini, aux facettes plutôt nombreuses pour un Disney, il nous conquiert en même temps que Belle. Enfin, notons que Gaston, le méchant, est une sorte de caricature des anciens princes de Disney. Sa présence est donc jubilatoire, notamment parce qu'il représente l'homme rustre moyenageux par excellence, frimeur, macho, sur de lui... bourré de défauts il en serait presque attachant. Les personnages secondaires sont eux, tous reussis, particulièrement le duo Lumière/Big-Ben, dont la relation est amusante et agréable. L'humour, d'ailleurs, est savamment dosé ici.

Enfin, impossible de parler d'un disney, et surtout d'un de ceux des années 90, sans evoquer les chansons ! La première, "Belle", n'est clairement pas la plus marquante, mais elle a au moins le mérite d'avoir une utilité dans le récit : nous présenter l'heroine de manière concise mais efficace, ainsi que, du même coup, ses problématiques propres. "Gaston" a la même fonction, mais cette fois, pour présenter le méchant, sur une melodie entrainante mais pas non plus mémorable, même si, du reste, elle est agréable. "C'est la fête" ne sert à rien dans le film, mais soutient une scène incroyable, et est une chanson très efficace, qui de plus, nous fait honneur. "Je ne savais pas" souligne avec tendresse les sentiments naissants entre les deux protagonistes, tandis qu'"Histoire étrnelle", superbe à tout point de vue, vient officialiser cette union. Enfin, "Tuons la bête", fait grimper la tension du combat final.

Bref, le film a beaucoup de qualités. Et plus de vingt ans apres sa sortie, il n'a pas vieilli, renvoyant les mêmes émerveillements qu'a l'époque, et ce, même en l'absence totale de nostalgie !