La Belle et la Bête par Hugo Harnois
L'art est un éternel recommencement, et l'œuvre dépasse sans cesse le créateur. La Belle et la Bête est une histoire vieille de millénaires et reprise par les plus grands (Cocteau, Disney, Glass). Mais l'homme du Pacte des loups et Silent Hill prouve qu'il n'a pas froid aux yeux en reprenant à son compte cette légende métaphorique, avec deux des plus grands acteurs de leur génération : Léa Seydoux et Vincent Cassel. Mais la question est la suivante : peut-on croire encore aux histoires d'amour en 2014 ?
Il n'y aura pour cette nouvelle version de Le Belle et la Bête aucun mystère puisque Gans affiche ses intentions dès le départ : ce sont les enfants les premiers visés, car c'est à eux que cette histoire est racontée. C'est la première faute du réalisateur qui veut, avec son remake, embrasser tous les publics. Mélanger ici le drame et la légèreté ne marche à aucun moment, il ne fait que rendre l'œuvre inégale et déséquilibrée. Quand une scène déchirante (la Belle refusant l'amour de la Bête) succède à une séquence antinomique (la Belle riant à la vue de petites créatures), on est en droit d'être perdu.
Le deuxième problème, c'est que nous ne croyons à aucun moment en l'amour de ces deux personnages. Gans a eu la bonne idée de s'intéresser davantage à la famille du marchand en leur accordant plus de temps et d'importance. Mais quand cette partie narrative prend le pas sur la romance, il y a un véritable soucis. Quid de l'attraction / répulsion de Belle et du lien qui devrait les unir ? C'est le néant, même si des thèmes bien connus restent ancrés dans cette histoire universelle. Les pêchés (la cupidité, l'envie) tout comme la sauvagerie humaine sont présents, mais déjà ressassés à maintes reprises.
Le troisième et dernier problème est malheureusement la présence de Léa Seydoux. Si l'on ne peut lui enlever sa qualité d'actrice dans de nombreux films (Les Adieux à la Reine, L'enfant d'en haut, Grand Central), il faut reconnaître que le rôle de princesse ne lui va pas du tout. Malgré la magnificence de ses robes. Malgré l'univers baroque et fantastique dans lequel elle s'inscrit. Ce n'est cependant pas une surprise de soutenir que Vincent Cassel est excellent dans le rôle de la Bête, pleine de virilité et de sauvagerie. Mais derrière cette qualité se cache un défaut : son visage qui devrait être monstrueux ne fait tout simplement pas peur. Une fois encore, les enfants sont l'objectif visé. Dommage que le cinéaste se soit tromper de cible.