La violence, la vraie

A l'époque où je n'étais qu'un petit kéké qui ne jurait que par des films comme "Saw" ou "Hostel" lorsque le propos de la conversation était relatif à la violence dans le 7ème art, c'est avec un peu de retenue que j'accueillis le fait d'aller voir, avec mon lycée, "La Cérémonie" de Chabrol au cinéma. Non pas que je préférais aller en cours plutôt que de me vautrer sur un siège de cinéma bien moelleux. Mais ça avait l'air mortellement chiant.

Contre tout attente, de nombreuses scènes me firent bailler à m'en décrocher la machoire. Une simple histoire de bonne analphabète qui se lie d'amitié avec une postière désaxée, quoi de plus. Ce que j'ignorais, c'était tout rapport que le film entretenait avec un certain fait divers. Il n'empêche que, n'ayant jamais vu un seul film de Chabrol avant celui-ci mais ayant entendu beaucoup parlé du bonhomme, je me doutais bien qu'un réalisateur encensé de cette manière n'allait pas se limiter à une excentrique amitié entre deux marginales.

Et c'est la scène finale qui donne tout son sens au film. L'illustration de la véritable violence. Froide. Réaliste. Sans pitié. Rien à voir avec la "violence" grand-guignolesque de "Saw". Pendant les quelques minutes de carnage, le ventre noué, mes mains agrippées à mon siège (que je ne trouvais plus si moelleux), je me disais "Non, elles vont pas faire ça quand même". Je ne me considérais pas comme impressionable avant ce jour. Je ne considérais même pas que le cinéma français pouvait provoquer de telles réactions. Et pourtant.

Je l'ai revu depuis, mais aucun visionnage n'égalera désormais le premier, celui qui m'a ouvert les yeux sur la cruauté dans sa forme la plus pure, sur cette mise en scène morbide et terriblement réaliste. Et même si je baille toujours de temps à autres, je ne peux m'empêcher d'avoir des frissons en pensant à la mise à mort de toute une famille.