Il s'agit du troisième opus d'un triptyque, faisant suite au Déclin de l'empire américain et aux Invasions barbares. Si les deux premiers films évoquaient déjà une critique de l'évolution sociale, morale, politique et sexuelle en Amérique du nord, celui-là prend la forme d'un thriller dénonçant davantage l'évasion fiscale, l'aveuglement du système politico-financier, les difficultés de la police et de la justice, comme leurs turpitudes. Les thèmes des deux premiers demeurent mais en arrière-plan.
Le personnage principal est un chauffeur-livreur doux et complexé, et au moins autant intellectuel. Titulaire d'un doctorat un philosophie, il déplore l'évolution consumériste et financière de la société qui sécrète des médiocres dans la sphère des élites dans les différents domaines. Mal dans sa peau, il n'arrive pas à s'épanouir, se sépare de sa compagne, végète, puis assiste malgré lui au braquage d'un établissement bancaire. S'il se tient à carreau et assiste à un massacre, il embarque tout de même les deux sacs de sport comportant le butin. Et c'est là que ses problèmes commencent, car il ne sais évidemment pas comment conserver et écouler tant d'argent liquide, alors que la police est évidemment lancée sur le coup. Il fréquente une prostituée de luxe qui se laisse attendrir et finit par vouloir l'aider, contacte un repris de justice expert en affaires, tout ce petit monde contacte un avocat fiscaliste leur préparant un plan d'évasion internationale. La police coffre ce dernier, suit de prêt les lascars et souhaite également les compromettre, mais Pierre-Paul, notre brave livreur devenu malfrat par hasard et par erreur, a réussi à se constituer une couverture via une fondation humanitaire en faveur des enfants malades.
Comme pour les deux premiers films, un humour aussi noir que grinçant règne dans cette oeuvre ; or, s'y ajoute ici de la violence physique et une intrigue policière. Celle-ci arrive à faire réfléchir de nouveau sur les déviances économiques et sociales de nos sociétés occidentales, dans un climat encore plus déconcertant et désabusé que les deux premières. Elle vaut la peine d'être méditée.