La Condition de l'homme 1 - Il n'y a pas de plus grand amour par drélium
La condition de l'homme prend toute sa consistance et sa puissance finalement achevée, c'est à dire après 9h30 divisées en 3 films eux-mêmes séparés en 2 parties. Faites chauffer les rétroplannings... Masaki Kobayashi charge comme jamais sur le pouvoir séculaire et les traditions autoritaires Japonaises à travers la vie de Kaji, en partie autobiographique, humaniste et altruiste au dernier degré de désintéressement mention Barberousse, pris entre ses rêves de monde meilleur et la machine faussement invisible de la seconde guerre mondiale.
Les trois plus grandes parties de sa vie, avant, pendant et après la guerre forment une trilogie parfaitement cohérente. Leader naturel des opprimés, cible surveillée par ses supérieurs qui redoutent mais aussi respectent sa motivation et son intelligence, Kaji apprend à vivre à l'encontre de ses principes, luttant inlassablement pour une illusion d'égalité pour les autres et de liberté pour lui-même, emprisonné dans un monde où la déloyauté est la norme. L'amour qu'il porte pour sa femme, uniquement présente dans la première partie, pourtant la plus éprouvante, est maintes fois troublé mais reste son plus précieux soutien pour survivre.
J'éviterais de vouloir trop résumer ce film fleuve. Pour faire simple, la première partie, c'est Voyage au bout de l'enfer, la seconde, c'est le futur Full Metal Jacket (Kubrick a pompé toute la première partie), et la troisième c'est Il faut sauver le soldat Kaji... Non, je déconne Steven, ce serait plutôt l'antithèse même.
Nous accompagnons les rêves, les pensées et les convictions de Kaji au fil d'un éprouvant voyage personnel, confronté à l'effondrement général des valeurs du Japon. Pris pour un communiste par les Japonais, puis pour un fasciste par les Russes, on reprochera le manque de compassion du réalisateur pour ses personnages mais c'est aussi et surtout pour mieux appuyer les forces et les faiblesses humaines, celles de Kaji mais aussi celles des nombreuses vies qui l'accompagnent, le contredisent ou le remettent en question.
Entre réflexions politiques, sociales, passionnelles et philosophiques, Tatsuya Nakadai est absolument incroyable de puissance d'un bout à l'autre et semble même porter le film vers d'autres cimes dans la dernière partie. Ce dernier volet décuple d'ailleurs la puissance globale de la trilogie pas forcément parce qu'il est meilleur que les deux autres, juste parce qu'une fois terminé, il scelle le tout si parfaitement que l'oeuvre entière y prend tout son poids. La mise en scène est somptueuse, particulièrement sous la neige, et les quelques passages un peu moins porteurs sont vite pardonnés à la vue du résultat final simplement monumental.