Devant de tels remakes on accuse tantôt la détermination d’une industrie à lever l’amnésie d’une génération à laquelle il semble plus facile – rentable ? – de proposer un reflet 2.0 d’une œuvre originale jugée certainement trop vieille, tantôt ce réservoir de fictions réputé pour ses limites et qui serait alors à ce point à sec qu’il faille ressortir du cercueil une mythologie culte ayant donné naissance à une série puis deux petits bijoux de la comédie noire. Car La Famille Addams cru 2019 (ou « cri 2019 », pour prolonger l’une des blagues du long-métrage) est un vulgaire recopiage des codes, des tics et des couleurs qui définissent les œuvres originales sans réussir, et c’est là son plus grand tort, à ressusciter le mordant qui conférait leur âme à la série et aux adaptations effectuées par Barry Sonnenfeld.


Or, nous sommes ici plus proches du téléfilm de 1998 (l’exécrable La Famille Addams : Les Retrouvailles), dans le sens où la surenchère burlesque qui caractérise le rythme desdites suites n’est jamais pensée comme un élément privilégié pour construire une atmosphère, mieux pour élaborer peu à peu une identité qui seule permet la distinction – et donc l’autonomie – d’une suite sur son modèle. Non, l’univers de la Famille Addams est passé à la moulinette contemporaine de l’épileptique, dynamique qui détruit entièrement la puissance morbide de l’ensemble pour lui préférer les discours consensuels sur l’émancipation et le droit à la différence. Le noir contre la couleur, l’individualité contre la conformité. Pas de chance, le propos qu’aimerait développer le film est contredit dans sa structure même par la grande banalité de son scénario, la qualité hideuse de l’animation qui paraît encore inachevée, la bêtise du gothique ici édulcoré. Dire l’émancipation mais se ranger artistiquement, affadir un univers pour le rendre inoffensif.


Les scènes se suivent sans s’influencer les unes les autres, si bien que nous avons l’impression de parcourir des yeux, et dans le désordre, les vignettes d’un album mal dessiné, franchement laid, qu’un enfant aurait arraché puis jeté devant nous. Même les reprises et déclinaisons musicales du thème emblématique échouent à insuffler un semblant de macabre à cette bouillie incolore et inodore, qui n’a pour elle que quelques plans atypiques, trop vite rattrapés par le reste.

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le 4 janv. 2020

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