La Famille Tenenbaum par goummo
On est toujours le bienvenu dans le cinéma de Wes Anderson. Créateur mélancolique, gardien sarcastique et guide un brin maniériste d'univers bigarrés où gravitent des personnages haut en couleur, l'auteur fait de nous des hôtes de luxe, allant même jusqu'à nous réserver les premières loges. Voir ses films, c'est franchir une frontière, découvrir des contrées improbables à l'espace-temps totalement déréglé, dont les dimensions et le contenu débordent de détails insolites.
A mesure qu'on l'inspecte, cet espace-temps s'annonce bordélique, foisonnant et bizarrement excessivement mouvant. Tout y semble possible, n'importe quoi peut vous taper dans l'œil. Une fois de plus, ce ressenti va se vérifier avec La Famille Tenenbaum.
On en prend effectivement plein les mirettes. Ce film est d'une classe folle, burlesque et patraque comme il faut. Anderson s'y sert du grotesque comme filtre révélateur, enfilant les images technicolores. Des scènes tirées au cordeau, hyper travaillées dans leur moindre recoin (il n'y a certainement pas assez d'une vie pour en déceler tous les détails) dans lesquelles il fait évoluer l'ensemble de ses acteurs, comme un gamin se jouerait de ses soldats de plombs. Une mise en scène et une direction d'acteurs à travers lesquelles Anderson laisse transpirer sa vison du monde moderne, ses névroses, ses craintes, ses joies aussi.
Du rire aux larmes, une expression ma foi bien galvaudée, à laquelle La Famille Tenenbaum redonne un peu de sens. On se laisse accrocher par ces histoires branques et leurs protagonistes hors norme, même si à voir évoluer tout ce joli monde , quelques frustrations pointent leur nez. Un peu d'agacement en quelque sorte. Disons qu'à force de grossir le trait et multiplier les imbroglios familiaux, Anderson a tendance à brouiller les pistes, et son dispositif peut par moment tourner à vide.
Au trois quart du film, on espère secrètement que ça va se calmer, histoire qu'on puisse profiter pleinement d'un ou deux personnages. Mais ça n'arrive pas vraiment. On se retrouve par moment comme face à un vieux pote déconneur qu'on serait ravi de retrouver, mais dont on aimerait qu'il arrête de la ramener sur tout et n'importe pour l'écouter enfin nous parler réellement de lui.
Rien de bien méchant, du moins rien qui ne puisse nous faire regretter d'avoir profiter de ce film.
Spéciale dédicace à Royal Tenenbaum - impérial Gene Hackman - père de famille infréquentable, sale con profiteur et malgré tout franchement attachant.
Mention spéciale pour la performance d' Owen Wilson, qui semble-t-il , joue de bout en bout défoncé à la mescaline. Si ce n'est pas le cas, c'est de toute façon foutrement bien imité !